210 aime - Académie du Gaullisme

La Lettre du 18 JUIN Vingt- sixième année – n° 210 – octobre 2018
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210 aime

par Georges AIMÉ
QUELLE EUROPE VOULONS-NOUS ?
Une des raisons majeures de l‘échec de la construction européenne et de la pétaudière dans laquelle est le Parlement européen est qu'il n'a pas été tenu compte de l'Histoire des pays prétendant la constituer. Nous connaissons tous la façon dont chacun d’eux s’est constitué et est devenu un État. Inutile de la rappeler. La France n’est pas un État fédéral. La perception des Français d’une Union ne peut donc pas être celle des Allemands, des Italiens, des Espagnols ou des Belges. C'est un constat.
Il n’y a pas lieu de réécrire sans cesse cette Histoire, laissons cela aux historiens. Il ne faut rien connaître de celle-ci ou être un illuminé pour prétendre le contraire... n’en déplaise à certains de nos dirigeants Pour tenter de rapprocher des peuples à l’Histoire à la fois si proche et si différente, il convient, avant de leur imposer des règles drastiques qu’ils ressentent comme autant d’ingérences, d’interdictions, d’obligations, de frustrations aggravées par le fait qu’elles sont loin d’être partagées par tous, de leur donner envie de partager ensemble un avenir. Cela commence par l’harmonisation des diverses législations et des règles qui régissent leur vie.
Il est plus important d’avoir un droit du travail et une fiscalité communs que des cages pour poules pondeuses ou des plaques d’immatriculation identiques ! Il est impératif que les produits interdits et les règles de sécurité alimentaire, environnementale, sanitaire soient les mêmes pour tous. Pour ne citer que ces quelques exemples. Il est également important de parler de la culture et des modes de vie de chacun. Pour comprendre l’Autre il faut le connaître. Bien peu d’entre nous connaissent la façon de vivre des Espagnols, le système politique belge, les préoccupations des Italiens ou le fonctionnement de l’État fédéral d’Allemagne pour ne prendre que ces quatre pays frontaliers.
Quant aux arts de ces différents pays... c’est l’ignorance totale ! Heureusement qu’il y a le foot, ce jeu de mercenaires apatrides, pour faire illusion ! L’Europe technocratique que l’on veut nous vendre depuis des décennies est une Europe de l’argent-roi, celle qui permet la libre circulation des capitaux, des hommes, des marchandises et de la financiarisation de l’économie.
Une Europe au service de spéculateurs et de sociétés apatrides qui n’ont qu’une crainte : qu’un État fort se dresse devant eux et les empêche de spéculer ou de commercer comme bon leur semble. Cette Europe technocratique pousse à la communautarisation. « Diviser pour mieux régner », fléau dont on n’a pas fini de mesurer les ravages.
Avoir envie de constituer un État fort, indépendant et libre de ses choix ne peut se faire à 28 ! Chaque jour nous en apporte la preuve. Harmoniser des législations ne peut se faire à 28 ! Ce qui ne s’est pas fait en cinquante ans ne se fera pas demain. Deux solutions s’offrent donc à nous :
1° Soit nous sortons purement et simplement de l’Union européenne et travaillons, avec les six pays fondateurs auxquels on ajoute, s’ils le désirent, l’Espagne et le Portugal, à une reconstruction avec la ferme volonté d’aboutir au bout de dix ou quinze ans à une totale fusion. En attendant cette reconstruction les pays redevenus totalement indépendants s’engageront à établir entre eux des échanges commerciaux équilibrés (ce qui interdira les tentations asiatiques) et à assurer conjointement leur défense militaire sans faire appel à d’autres puissances extérieures. En ce qui concerne la monnaie, il y aura lieu de décider, en attendant le terme, soit de revenir aux monnaies nationales, soit de lier la monnaie nationale à l’euro (euro-franc, euro-lire, etc.) avec une monnaie d’échange proche de ce qu’était l’écu dans un serpent monétaire adapté aux différentes économies. Une banque centrale sera créée et c’est elle qui prêtera directement aux États. La spéculation à court terme sera interdite.
2° Soit les pays du Sud (France, Italie, Espagne, Portugal) décident conjointement de sortir de l’Union européenne et de constituer une Union des Peuples du sud avec pour objectif d’harmoniser leurs différentes législations et autres codes pour aboutir en dix ans à un référendum sur la fusion des quatre pays en un seul. En ce qui concerne la monnaie même fonctionnement qu’évoqué au point 1°. Je n’ai pas évoqué ici la solution d’un repli total.
Ce serait à mon sens une erreur fatale. L’histoire s’est écrite en avançant, jamais en reculant. Si la tentation est grande pour certains dirigeants politiques ce n’est pas la réelle volonté des peuples, en particulier des jeunes, qui restent très attachés à l’idée européenne.
Les replis constatés sont dus aux brutaux changements culturel et cultuel révélés par une immigration bien souvent manipulée par les tenants d’une idéologie obscurantiste et ne correspondant en rien aux valeurs propres à presque tous les pays européens. Certes, dans un passé proche, Italiens et Polonais (nombreux, fuyant la misère chez eux), Arméniens (fuyant le génocide perpétré par les Turcs), Russes (fuyant les Bolcheviks), Espagnols (Républicains fuyant le franquisme), Maghrébins (ayant choisi de suivre la France), plus près de nous Portugais (fuyant la crise économique sévissant dans leur pays), ont eu, eux aussi, à faire face à une hostilité ayant amené des exactions condamnables et des décisions gouvernementales (expulsions d’aprèsguerre) inacceptables.
Il est à noter qu’à chaque fois cette hostilité avait pour cause des difficultés économiques rencontrées par notre Pays. Cela n’excuse certainement pas ce qui a été fait à l’époque mais cela l’explique ; le reniement et la lâcheté sont consubstantiels à l’exercice du pouvoir ; aujourd’hui l’attitude de beaucoup de nos « élites » n’est guère différente : elles sont prêtes à tout oublier pour tenter d’être. Toutes ces populations venues d’ailleurs, sans renier leur origine, ont eu à cœur de s’intégrer dans leur pays d’accueil sans vouloir imposer quelque mode de vie que ce soit. Ils ont appris le français, accepter notre « vivre ensemble » républicain et notre société laïque.
Ils l’ont enrichie par leurs différences sans imposer celles-ci. Notre langue (apport de mots nouveaux), notre culture (peinture, musique, etc.), notre vie quotidienne (chansons, sports, etc.), notre gastronomie (pizza, couscous, paëlla, etc.) témoignent de leurs apports. Notre système républicain, en ne faisant pas de différence, nous a donné et leur a donné la chance de devenir ‘’nos’’ prix Nobel, ‘’nos’’ scientifiques, ‘’nos’’ philosophes, ‘’nos’’ artistes, ‘’nos’’ ingénieurs de renommée mondiale, ‘’nos’’ sportifs champions du monde et ‘’nos’’ ouvriers hautement qualifiés.
Pour la plus grande fierté et le plus grand bonheur de tous. Nous devons tirer les enseignements de notre propre construction nationale pour tenter de construire une Europe qui ne rejette ni les uns ni les autres tout en gardant nos idéaux de liberté (dans la stricte observance de l’égalité de la femme et de l’homme), de tolérance (non de permissivité) et de laïcité (dans l’esprit de la loi de 1905).

© 05.10.2018
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