« IL FAUDRA QUE LES FRANÇAIS S’EN SOUVIENNENT… »
(Charles De Gaulle)
« Parce qu’un homme sans mémoire est un homme sans vie,
un peuple sans mémoire est un peuple sans vie. »
(Maréchal Foch, 1851-1929)
Préserver la mémoire collective.
Il est précieux le temps de la mémoire qui continue de hanter l’histoire française, celle de tous nos territoires. Ceux qui avaient déjà quinze ans ou plus en 1940, ont presque tous disparu. En héritage, il nous reste les témoignages écrits de cette époque manichéenne à la fois si lointaine et si proche de nous. Le 20 juillet 1960, lorsque le général De Gaulle se rendra pour la première fois au camp de déportation du Struthof, il sera profondément marqué par l’ampleur des souffrances endurées pendant la guerre et prononcera ces mots : « Saint Exupéry avait raison, il était plus difficile d’être un otage que de combattre sous un uniforme. La déportation est la voie la plus douloureuse de la Libération. Il faudra que les Français s’en souviennent. »
Quelle leçon avons-nous tiré de la guerre qui a surgi si rapidement ? Nous pouvons être menacés à tout moment par la force hégémonique d’un autre pays face auquel nous devrons être prêts le cas échéant aussi bien humainement que militairement.
La fulgurance tragique de l’histoire.
L’Allemagne et l’URSS signent le pacte de non-agression germano-soviétique, le 23 août 1939. Dès le 1er septembre, l’Allemagne envahit la Pologne, le 3 septembre, la France et l’Angleterre déclarent la guerre à l’Allemagne. Staline fait entrer ses troupes en Pologne, le 17 du même mois. La Pologne ne résiste pas, finit par capituler. Jusqu’en avril 1940, aucun combat grave n’est à signaler en France de la frontière Suisse au Luxembourg. Quant à l’industrie allemande, elle tourne au maximum de ses capacités pour fabriquer des chars et des avions.
Côté français, on ne prend pas vraiment la mesure de ce qui est en train de se tramer sur les ambitions hégémoniques du voisin allemand. Le 11 avril 1940, l’Allemagne envahit le Danemark et la Norvège, déclenche son offensive à travers la Belgique et le Luxembourg. L’anéantissement de l’armée française se précise en quelques jours près de Sedan. Le 13 mai, l’Allemagne lance ses chars sur Dunkerque.
Le 18 mai, Paul Raynaud devient président du Conseil des ministres après Daladier et nomme le général Weygand, chef des Armées, pour remplacer le général Gamelin. Pétain devient vice-président du Conseil. Le 22 juin 1940, l’armistice est signé en forêt de Rethondes où vingt ans plus tôt le maréchal Foch a reçu la capitulation de toutes les armées allemandes. Dès lors, Pétain installera son administration en zone dite « libre », cela n’empêchera pas les Allemands de l’envahir en novembre 1942 pour rester durablement. Lorsque la France fut scindée en deux zones par la ligne de démarcation, elle ne faillit jamais s’en remettre.
Qui s’en souvient, aujourd’hui ?
A part les survivants de cette terrible histoire pour lesquels la ligne de démarcation est restée intacte dans les mémoires, qui peut imaginer toutes les tragédies humaines vécues, entre ceux qui voulaient traverser, leurs dénonciations et leurs arrestations. Gloire à tous les Français libres tel Louis Renard, de Poitiers, qui créera le 31 août 40, le premier réseau de résistance dans le département de la Vienne et fera parvenir par un intermédiaire une lettre très significative mais surtout très émouvante au général De Gaulle : « Je veux que vous sachiez que vous représentez pour la plupart de nous, le seul espoir de la libération du pays… Je vois des quantités de jeunes gens qui ne demandent qu’une chose, c’est de partir… Quel moyen aurons-nous au printemps prochain de participer à la lutte, soit en allant en Angleterre, soit en Afrique du Nord ? Quel moyen aurons-nous de vous rejoindre ?... Nous savons avec émotion et reconnaissance combien le courage et le sacrifice de tous ces hommes et de toutes ces femmes nous ont permis d’être libres aujourd’hui.
Le monde change de nouveau.
A nouveau, la même question de l’indépendance se pose comme au temps du général De Gaulle. Au-delà, c’est le sens de la nation qui nous interpelle : « Le président de la République ne saurait être confondu avec aucune fraction. Il doit être l’homme de la nation toute entière, exprimer et servir le seul intérêt national. » disait le général De Gaulle. Quand est-il aujourd’hui face aux extrêmes ? Lorsqu’un pays a perdu le sens de la nation, les divisions les plus violentes apparaissent, l’histoire a montré combien ses divisions pouvaient être dévastatrices face à un pouvoir faisant allégeance à l’ennemi en 40, malheureusement soutenu par la majorité des hommes politiques de l’époque.
Chacun ne doit pas résonner seulement par rapport à son propre avenir, mais à l’avenir de son pays, la liberté individuelle est menacée face aux défis du monde qui se dessinent, seul l’élan collectif symbolise l’espoir. Lors de son entretien télévisé du 15 décembre 1965, De Gaulle a dit : « La France, ce n’est pas la droite, la France, ce n’est pas la gauche », « Pour lui, la France, c’était tous les Français quelles qu’eussent été leurs aspirations. » dira Pierre Lefranc lors d’un entretien. Il ajoute : « Ils est des caractères manichéens qui coupent la France en deux : les bons et les mauvais. Ces caractères, on en trouve aussi bien à droite qu’à gauche. Je me suis toujours opposé à la qualification du gaullisme comme une orientation de droite. On a vu De Gaulle agir en homme de progrès, toujours préoccupé par l’aspect social de sa politique. N’a-t-il pas écrit : « La seule querelle qui vaille est celle de l’homme » ? Classer De Gaulle à droite constitue une erreur, et prétendre qu’il n’y avait qu’une voie salutaire et qu’elle se situait justement à droite, était une faute contre la nation. »
Qu’est-ce qu’une nation ?
Comme l’écrivait magnifiquement Ernest Renan : « Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore, voilà les conditions essentielles pour être un peuple. »
Le général De Gaulle a toujours montré cette volonté de rassemblement pendant la guerre, dès la libération en 1944, il évite la guerre civile, pour réconcilier la politique, De Gaulle ramène le consensus, dans son mouvement politique en 1947, lors de son retour au pouvoir en 1958. De Gaulle a toujours gouverné à partir des réalités, le gaullisme est une histoire, pas une doctrine, on la prend en entier.
« Je suis un homme qui n’appartient à personne et qui appartient à tout le monde » dira le général De Gaulle dans sa conférence de presse du 19 mai 1958. Après 1970, il fera l’unanimité auprès de tous les Français qui se souviendront pour toujours qu’un homme hors du commun était venu pour les sauver du chaos, n’agissant que pour le bien de la France et sa grandeur.
*Christine ALFARGE Secrétaire générale de l'Académie du Gaullisme.
© 01.12.2021