« Et si le gaullisme venait de Clemenceau ? » Christine Alfarge - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
Président-fondateur Jacques DAUER
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« Et si le gaullisme venait de Clemenceau ? »
« Aux grands hommes, la patrie reconnaissante »


par Christine Alfarge,
À l’occasion du 104ème anniversaire de l’armistice du 11 novembre 1918 dont la cérémonie officielle fut instaurée par le général De Gaulle en 1944, c’est notre devoir de transmettre inlassablement le récit  national français à partir de la Grande Guerre, revenir sur cette tragédie et son cortège de souffrances humaines réduisant les hommes à de la chair à canon sans comprendre ni savoir pourquoi ils venaient se battre. « Défendre la patrie, c’est pour un peuple défendre à la fois son passé, son présent et son avenir. » Gustave Le Bon. Hier et demain, 1918.
Que s’est-il passé ?
De 1914 à 1918, l’Europe et une partie du monde s’engagent dans la première guerre totale de l’histoire, mobilisant d’énormes moyens militaires et industriels pour remporter la victoire.
Juin 1914, l’archiduc François-Ferdinand et son épouse sont assassinés à Sarajevo en Bosnie-Herzégovine, le jour de l’anniversaire de mariage du couple princier. La mort brutale de l’héritier du trône de l’Empire austro-hongrois met le feu aux poudres, le conflit est à la dimension mondiale jetant 60 millions d’hommes dans la bataille avec de lourdes pertes humaines.
Sur fond de nationalisme et de rivalités stratégiques, politiques, économiques, les origines de cette guerre naissent dans la volonté hégémonique de nombreux pays. Puissance économique de premier plan, l’Allemagne souhaite s’étendre à l’est et renforcer sa présence en Afrique et en Asie, l’Empire austro-hongrois sur les Balkans et la grande Russie du Tsar Nicolas II sur un Empire ottoman moribond.
L’illusion d’une guerre rapide.
Août 1914, l’Allemagne viole la neutralité de la Belgique et du Luxembourg avant de pénétrer dans le Nord-Est de la France.
Après plusieurs semaines de progression, l’armée allemande subit un coup d’arrêt en septembre 1914 par la contre-offensive de la Marne. Les troupes allemandes ne parviennent pas à percer le front et creusent des tranchées pour éviter de reculer davantage. La ligne de front  franco-allemand se stabilise sur 700 km de la mer du Nord aux Vosges.
Cette guerre qui ne devait durer que quelques mois, s’enlise pendant plus de quatre ans. L’Allemagne vaincue signera un armistice avec la France à Rethondes, le 11 novembre 1918.
De Gaulle dans les pas de Clemenceau.
Quelques années plus tard, un certain capitaine De Gaulle reprend le flambeau, signe du destin pour cette France qui s’était recroquevillée sur sa victoire après la première guerre mondiale sans penser un seul instant que l’ennemi d’hier voudrait prendre sa revanche. De Gaulle avait prévu 1940.
Il y a une part de Clemenceau dans De Gaulle qui achèvera ce que Clemenceau avait déjà commencé, le combat pour la liberté, l’autorité de l’Etat et l’unité de la nation. Le 12 mai 1946, le général se recueille sur la tombe de Clemenceau : « Quand la victoire sera gagnée et que la justice sera faite, les Français viendront vous le dire. Alors avec tous les morts dont est pétrie la terre de France, vous pourrez dormir en paix. » Tous ceux qui s’en réclament, ont-ils conscience que les valeurs défendues par ces grands hommes sont fragilisées, le progrès social est permanent. Aujourd’hui comme hier, nous sommes confrontés aux mêmes relents de racisme, d’antisémitisme, de xénophobie.
De Gaulle avait en mémoire le combat mené inlassablement par Clemenceau pour réhabiliter le capitaine Dreyfus en 1906. Le courage de Clemenceau est d’avoir su mener la bataille du droit et de la liberté comme celle menée par René Cassin contre les monstrueuses lois raciales du régime de Vichy en octobre 1940, prendre conscience de la place du droit en reconstituant sa fonction entre la morale et la politique.
Pour René Cassin, rétablir le droit : « Ce n’est pas attribuer d’autorité à un individu ou à un groupe la puissance d’obtenir quelque chose qu’il ne peut précisément recevoir, n’a jamais reçu et n’obtiendra jamais. Rétablir le droit, c’est lui rendre directement ou par compensation, de manière effective, ce qui lui a été effectivement soustrait par l’action injuste du Tiers, y compris l’Etat lui-même. »
« Mais, par-delà les épreuves, les délais, les   tombeaux, ce qui est légitime peut, un jour, être légalisé, ce qui est raisonnable peut finir par avoir raison. » écrivait le général De Gaulle dans ses Mémoires.
Le génie des grands hommes est d’éclairer l’univers.
Clemenceau et De Gaulle avaient la même foi en l’homme, des souffrances des Poilus mobilisés en 14-18 au courage des résistants de 1940 qui n’ont jamais cessé le combat, ils ne capituleront jamais face à l’occupant.
Le 18 juin 40, déterminé à en découdre avec l’ennemi, le général De Gaulle parle aux Français « L’espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive ? » Comme Clemenceau qui n’abandonnera jamais les soldats dans les tranchées, De Gaulle, fasciné par le « Tigre », sait qu’il n’y a pas d’autre choix que de combattre à nouveau jusqu’au bout par d’autres moyens pour que la France sorte victorieuse.
Que reste-t-il de leur héritage ?
Le plus marquant chez Clemenceau et De Gaulle, c’est qu’ils ne sont assimilables à aucun parti. Ils étaient au-dessus des partis, si les politiques se posent encore la question de l’héritage historique de ceux qui ont livré tous ces combats, il est vain de quelque parti qu’il soit de s’approprier ou se revendiquer de Clémenceau ou de De Gaulle quand on sait combien ils furent confrontés à une adversité redoutable, tous les horizons politiques confondus. Il faut surtout se demander, sans eux, qui aurait défendu la patrie ? Ce qui caractérise les héros de notre histoire, c’est leur intransigeance, leur fermeté, mais aussi leur générosité. Il faut bien connaître les hommes pour savoir les convaincre de la victoire.
C’est au bord de l’abîme qu’ils incarneront à leur époque, le suprême recours d’une France basculant dans un chaos inouï ayant perdu le sens de l’honneur. Si De Gaulle était un républicain de raison, conformément à la volonté des Français, Georges Clemenceau était un républicain de naissance et de conviction, montrant qu’un seul homme peut changer le cours de l’histoire, il dira : « De l’autorité, de la fermeté, de la volonté. »
Après lui, le général De Gaulle tirera les leçons de la Grande Guerre en allant plus loin avec « une certaine idée de la   France », une vision des intérêts du pays et ses institutions.
Que se passe-t-il en 1946 ?
Le général De Gaulle donne sa démission en janvier, refusant le régime exclusif des partis. En mai, alors qu’il a quitté le pouvoir, un premier projet de Constitution d’une IVème République proposé par voie de référendum, est rejeté. Le 16 juin, à travers son discours de Bayeux, le général De Gaulle définit les grandes lignes d’une Constitution adaptée à son temps avec la suprématie du Chef de l’Etat au-dessus des partis et garant de l’indépendance nationale.
Le 30 mai 1947, De Gaulle annonce une action pour une réforme des institutions indispensable face aux crises à venir. L’histoire lui donnera raison lorsqu’il sera appelé en recours en mai 1958.
« Personne ne doute que notre pays se trouverait vite jeté à l’abîme si, par malheur, nous le livrions de nouveaux aux jeux stériles et dérisoires d’autrefois » ; que « la clé de voûte de notre régime,
c’est l’institution d’un Président de la République désigné par la raison et le sentiment des Français pour être le chef de l’Etat et le guide de la France. » écrivait le général.
La classe politique s’est éloignée du peuple français sans analyser en profondeur la défiance des citoyens face aux pouvoirs qui se sont succédés. La nature ayant horreur du vide, aujourd’hui, les extrêmes veulent tirer profit des difficultés des citoyens, en brandissant l’étendard de la révolte auprès des Français ayant perdu leurs repères. De surcroît, se réclamer d’un parti gaulliste est une totale imposture venant de l’extrême droite française qui a toujours combattu férocement le général   De Gaulle jusque dans son intégrité physique.
Son idéologie reste la même !
Qui relèvera le glaive ? « La question est de savoir si ce sera en imposant une discipline démocratique garante des libertés ou si quelque homme fort et casqué tirera l’épée comme Alexandre. » « Le fascisme n’est pas si improbable, il est même, je crois, plus près de nous que le totalitarisme communiste. À nous de savoir si nous sommes prêts, pour l’éviter, à résister aux utopies et aux démons de la destruction », écrivait avec lucidité Georges Pompidou.
  
                                                                                                     *Christine ALFARGE Secrétaire générale de l'Académie du Gaullisme.
               

© 01.11.2022

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