Activité et emploi : des tendances lourdes P. Kloboukoff - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
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Activité et emploi : des tendances lourdes,
reflets de notre société
Croissance démographique ralentie et dépendance de l’immigration, féminisation de l’activité et de l’emploi, prépondérance des femmes dans la fonction publique, hospitalière en particulier, emploi non salarié en hausse pour  la défense de l’emploi, agriculture en voie de disparition, désindustrialisation et tertiarisation à outrance, emplois publics toujours aussi nombreux, importante réduction du temps de travail, salariat féminin à temps partiel en nette augmentation, réduction progressive des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes… sont des tendances lourdes marquantes reflétant des caractéristiques de l’évolution de notre société depuis trois décennies. Sans effacer les empreintes de la pandémie de la Covid, elles vont encore influencer les évolutions démographiques, sociales et économiques des prochaines années. Je leur ai consacré le présent article en puisant dans la source inépuisable de l’Insee qui a produit de nombreuses informations sur ces sujets récemment.
Un premier constat est la baisse de la fécondité de 2,029 à 1,850 enfants par femme de 2010 à 2019, ainsi que de celle du nombre annuel des naissances, descendu de 832 800 à 743 900. Malgré l’allongement de l’espérance de vie, le solde naturel annuel a diminué de 281 600 à 131 400 personnes avant de s’effondrer à 58 000 en 2020.
La croissance démographique a ralenti depuis 2011 malgré le concours appuyé de l’immigration. De 2011 à 2020, 43% de l’accroissement de la population provient de l’immigration. Que l’immigration soit subie ou facilitée, elle est désormais inséparable de « remplacement » et « islamisation ». La France semble en être dépendante pour soutenir sa croissance démographique, celle de sa population active, remplir un certain nombre d’emplois et, peut-être, pour peser sur les coûts de la main d’œuvre.
Le ratio population active (population employée + chômeurs) / population totale s’était amélioré de 1990 à 2011, montant à 44,5%. Depuis, il est un peu descendu, jusqu’à 44,1% en 2019, puis a plongé à 43,2% en 2020. La composition de la population en activité a aussi notablement changé.
Vive jusqu’à 2011, plus lente ensuite, la féminisation de la population active a progressé de 43,7% en 1990 à 48,5% de la population active totale en 2019. Elle s’est accompagnée de la progression dans l’échelle des CSP.
Plus de séniors et moins de jeunes en activité caractérisent aussi l’évolution. Avec pour principales causes : le vieillissement de la population, ainsi que les réformes incitant à l’accroissement du nombre d’années de travail, et l’allongement de la durée des études, avec la difficulté d’accrocher un premier emploi, ne serait qu’en CDD.
En raison d’une croissance économique morose, le nombre d’emplois salariés n’a cru que de + 4,4% de 2000 à 2010 et de + 4,7% de 2010 à 2019. L’emploi non salarié, lui, a progressé de + 10,6% de 2000 à 2010, puis de + 20%, et a dépassé les 3 millions en 2019. En fait, l’extension du chômage a été contenue par l’accroissement, favorisé et assisté par les gouvernants, des effectifs des autoentrepreneurs et des autres indépendants.
La tertiarisation de l’économie se lit aussi dans les chiffres de l’emploi. Le tertiaire ne cesse de s’étendre et a fourni en France métropolitaine 78% des 26,3 Mi d’emplois en 2019.
Dans le tertiaire marchand, le nombre d’emplois a cru de + 51% de 1990 à 2019, approchant 12,5 Mi, les secteurs les plus dynamiques étant les Services scientifiques, techniques et administratifs et l’Information et communication.
Dans le tertiaire non marchand, où les Administrations publiques sont prépondérantes, de 2010 à 2019, ce sont les emplois salariés de l’Hébergement médico-social et de l’action sociale, ainsi que ceux des services de Santé humaine qui ont le plus augmenté, l’Enseignement étant un parent plus pauvre. Par ailleurs, de 2005 à 2018, dans la FP Territoriale, non sans relation avec les transferts de compétences et de charges, le nombre d’emplois a augmenté de + 22,5% pour atteindre 1,915 Mi.
Depuis des années, les Services à la personne ont pris leur envol et procurent déjà 1,3 Mi d’emplois.
Les activités et l’emploi primaire et secondaire ont été réduits à peau de chagrin. En 2019, dans le total des emplois en France métropolitaine, ceux de l’Agriculture ne représentaient plus que 2,5%, ceux de l’Industrie, 12,5% et ceux de la Construction, 6,2%. Dans une économie « multi nationalisée »,
déprotégée et ouverte à la concurrence déloyale, il est difficile de rêver à une inversion des tendances.
Des centaines d’heures de travail en moins par an, à la recherche du « partage du travail ». 1 609 h en 2018, contre 1 967 en 1975 au total. Avec plus de temps travaillé pour les non-salariés que pour les salariés et pour les hommes que pour les femmes. Le temps partiel a augmenté, principalement chez les femmes, les jeunes et les séniors.
Des écarts salariaux sont enregistrés entre secteurs d’activités, entre les CSP et entre les femmes et les hommes. Ces derniers se sont réduits au fil des ans. Pour l’Insee, « Ecarts de rémunérations femmes-hommes : surtout l’effet du temps de travail et de l’emploi occupé » résume les raisons majeures de ces écarts. Sur les salaires en équivalent temps plein (EQTP), ils étaient de 16,8% dans le secteur privé et de 12,5% dans le secteur public en 2017.
 
Des changements démographiques importants,
pesants sur l’activité
Une fécondité en baisse depuis 2010
avant la chute de 2020
 
Des dirigeants de notre pays s’enorgueillissent de ce que la France a la fécondité la plus forte d’Europe. Possible ! Mais nous ne sommes plus dans les « 20 fécondes » qui ont vu le nombre annuel de naissances croître de 759 100 en 1995 jusqu’à 832 800 en 2010, puis décliner et passer en dessous des 800 000 en 2015. Depuis, la baisse a continué, jusqu’à 743 900 en 2019 avant que la pandémie fasse chuter le nombre de naissances à 726 000 en 2020 (1).
Tandis que l’âge des mères continuait de croître, de 29,3 ans en moyenne en 2000 à 30,8 ans en 2020, la fécondité s’affaiblissait, le nombre d’enfants par femme diminuant de 2,029 en 2010 à 1,850 en 2019 et à 1,813 en 2020.
Malgré la progression de l’espérance de vie à la naissance, qui a atteint 85,6 ans pour les femmes et 79,1 ans pour les hommes en 2019, le solde naturel est descendu de 281 600 en 2010 à 131 400 en 2019. En 2020, l’espérance de vie a reculé de - 0,4 ans à - 0,5 ans chez les femmes et les hommes. Le solde naturel est alors tombé à 58 000.
Le nombre de mariages s’est aussi effondré en 2020. Sans un retournement de situation, les perspectives ne se présentent pas sous les meilleurs augures pour la croissance démographique en France.
Dépendance démographique de l’immigration…
et économique ?
L’augmentation de la population de la France a été assez vive entre 1999 et 2011, puis ralentie de 2011 à 2020. L’immigration a été d’un grand secours pour notre croissance démographique et pour certains secteurs de l’économie …. Sans l’apport de l’immigration, la croissance de la population aurait été bien moindre, particulièrement au cours de la dernière décennie. Sur les 2,86 Mi d’habitants supplémentaires de la France entre 2011 et 2020, 1,23 Mi, soit près de 43% ont été des immigrés. Au cours des 21 dernières années, la population immigrée a cru de + 2,46 Mi de personnes et est montée de 7,3% à 10,2% de la population totale.
Assez logiquement, de 1999 à 2019, la population active immigrée a augmenté plus rapidement que la population active totale, montant de 8,6% à 10,7% de celle-ci.
Restant élevé à 13,6% en 2019, le taux de chômage des immigrés a tout de même baissé au fil des ans. Aussi, le nombre d’immigrés employés a cru de plus de moitié en 20 ans. Il était de l’ordre de 7% de l’emploi total en France en 1999. En 2019, il avoisinait 9,6%.

Infos sur les données et les sources : (a)Insee, séries population par sexe et par âge (2) : (b) Insee, population immigrée et étrangère de 1990 à 2020 (3) ; (c) Insee, Activité, emploi et chômage en 2020 et en séries longues (4) ; (d) : Insee, population selon le sexe et la CSP, données annuelles de 2014 à 2020 (5) ; (e) : Immigrés, activité, emploi : sources Insee et Dares variables selon les années. 1999 : Insee, population immigrée et population étrangère (6) ; 2011 : population des 15-64 ans, source Dares (7) ; 2018 : Insee Références, édition 2020 (i8) ; 2019 : Insee, enquête emploi 2019 (9)
Les infos ci-dessus rendent partiellement compte du poids de l’immigration dans la démographie de notre pays. France Portrait social, édition 2019 (10), rappelle que 6,4 Mi d’immigrés, et 7,5 Mi de descendants d’immigrés (personnes nées et résidant en France ayant au moins un parent immigré) résidaient en France, hors Mayotte, en 2018. De 2008 à 2018, le nombre des descendants d’immigrés a cru, comme celui des immigrés, de + 1,9% par an en moyenne, soit d’environ + 20% en 10 ans. Ensemble, 38% des immigrés et descendants d’immigrés ont encore pour origine géographique l’Europe. Ils sont devancés par les 45% originaires d’Afrique, dont la proportion a le plus progressé, de + 2,5% par an en moyenne de 2008 à 2018 pour les immigrés, et de + 4,1% pour les enfants d’immigrés.
    Féminisation quantitative et qualitative de la population active
 
Durant les trente dernières années, la part des femmes dans la population active de la France a continué de se rapprocher de celle des hommes en montant de 43,7%  en 1990 à 48,5% en 2019 et en 2020. Cette évolution s’est accompagnée d’une élévation dans l’échelle des catégories socioprofessionnelles, avec (en proportion) moins d’ouvrières, moins d’employées et davantage de professions dites intermédiaires ainsi que de cadres et de professions intellectuelles supérieures. Ainsi, en 2014, 6,9% des femmes actives appartenaient à cette dernière catégorie, leur part (40%) étant inférieure d’un tiers à celle des hommes actifs. En 2020, 8,7% des femmes actives sont cadres ou de professions supérieures, et leur part (42,7%) est inférieure d’un quart à celle des hommes. Compte tenu des performances scolaires et universitaires des jeunes femmes, ces tendances devraient se poursuivre.
On pourra observer (cf. tableau 1) que parmi les personnes immigrées actives, le nombre des femmes a également cru plus vite que celui des hommes entre 1999 et 2019, de + 56%, contre + 26%. Le « regroupement familial » a sans doute favorisé cette évolution.
Davantage de « séniors » actifs
Dans le courant des années 1990, le pourcentage d’actifs parmi les séniors de 60 à 69 ans avait diminué. Dans les années 2000, conséquences des réformes augmentant l’âge de la retraite et/ou durcissant les conditions d’octroi des pensions à taux plein, leur taux d’activité est remonté entre 1999 et 2020 : de 11,4% à 35,5% chez les 60 à 64 ans, et de 3,0% à 7,7% chez les 64 à 69 ans.
Depuis le milieu des années 2000, avec le papy boom, la population des seniors a fait un bond, et la population active également. C’est pourquoi, entre 1999 et 2020, le nombre d’actifs de 60 à 69 ans est monté de 0,949 Mi à 1,738 Mi, gagnant + 83%. Il reste cependant relativement modeste, représentant 6% de la population active totale (PAT) en 2020… contre 1,5% en 1999.
Moins de jeunes actifs
Avec l’allongement de la durée des études et la tertiarisation de l’économie, le nombre de jeunes actifs (en emploi ou au chômage) de 15 à 24 ans a considérablement baissé de 1975 à 1999, descendant de 4,85 Mi à 2,72 Mi, soit à 10,2% de la population active totale. Ensuite, ce nombre a connu des variations plus modestes, montant à 2,96 Mi en 2011, puis redescendant à 2,76 Mi en 2020, et représentant alors 9,4% de la PAT. Au cours des dernières années, le taux d’activité de ces « juniors » a diminué, s’établissant à 35,6% en 2020, contre 36,8% en 2019 et 37,5% en 2018. Cette évolution n’est sans doute pas sans lien avec la paupérisation des jeunes dont les médias ont fait état.
Emploi : des évolutions contrastées
Une croissance de l’emploi salarié ralentie
depuis les années 2000
Stimulé par la croissance du PIB, exceptionnellement forte lors de la « bulle Internet » de la fin du siècle dernier, l’emploi total en France a augmenté de + 8,1% de 1990 à 2000 pour atteindre 25,59 millions. Durant cette période, l’emploi salarié a progressé de + 12,9%, faisant reculer l’emploi non salarié, plus précaire, qui a perdu - 24% et dont l’effectif est tombé à 2,31 Mi en 2000.
Au cours des deux décennies suivantes, avec une croissance du PIB nettement moindre, l’emploi total a progressé de + 4,9% de 2000 à 2010 et de + 6,2% de 2010 à 2019. Contrairement aux années 1990, c’est l’emploi non salarié qui a été le plus dynamique. Au cours de ces deux périodes, il a progressé successivement de + 10,6%, puis de + 20% (beaucoup plus que le PIB) et a retrouvé en 2019, avec un peu plus de 3 millions d’emplois un niveau proche de celui de 1990.
En fait, surtout après la crise de 2008-2010, et malgré les copieuses subventions dont elles ont bénéficié, avec le Crédit impôt compétitivité emploi (CICE) en particulier, les entreprises ont peu recruté.
De 2010 à 2019, le nombre d’emplois salariés n’a augmenté que de + 4,7%.
En fait, le développement du chômage a été limité par l’accroissement des effectifs des autoentrepreneurs et des autres indépendants. Les gouvernants se sont d’ailleurs « efficacement » employés à faciliter les démarches administratives des intéressés (ne trouvant pas d’emploi salarié notamment) et à alléger leurs fardeaux fiscaux, avec l’aménagement du statut d’autoentrepreneur, en particulier.

Sources : Insee : TCRED - Emploi au 31 décembre, série longue (11) ; Insee : PIB Evolution en volume (12).
Quel avenir pour l’emploi non salarié ?
Après avoir cru de + 32,5% de 2000 à 2019, l’emploi non salarié aurait encore notablement augmenté en 2020. D’après les résultats de l’enquête emploi en continu publiés par l’Insee le 11 mai (13), le nombre d’emplois non salariés (NS) aurait atteint 3,35 Mi en 2020, sur un nombre total de 27 Mi d’emplois en France.
 
Les effectifs employés seraient de 0,361 Mi dans l’Agriculture, de 0,184 Mi l’Industrie et de 0,418 Mi dans la Construction. Le Tertiaire est encore dominant, avec 2,34 Mi d’emplois. Du côté des activités économiques, les secteurs les plus « lourds » sont les Commerces, 0,480 Mi d’emplois, l’Hébergement restauration, 0,157 Mi, les Spectacles et activités récréatives, 0,128 Mi, les Activités juridiques, comptables, de gestion, d’architecture…, 0,287 Mi, et les Services administratifs et de soutien, 0,122 Mi. Du côté des services aux ménages, les Activités pour la santé humaine se distinguent avec 0,431 Mi d’emplois, et les Autres activités de service procurent du travail à 0,185 Mi de personnes.
Presque toutes ces activités d’indépendants sont vulnérables, la pandémie le montre. Elles ont aussi beaucoup de difficultés à supporter la concurrence avec les autres entreprises dans les secteurs où elles exercent.  Et la tendance est à la concentration. Aussi, sauf cas particuliers, leur avenir dépend de celui des entreprises employant des salariés, dont elles sont en partie un « complément » pour l’emploi. Si celles-ci sont florissantes et confiantes dans leurs perspectives, elles embaucheront davantage et la proportion des NS diminuera. Dans le cas contraire, la part des emplois NS continuera de croître… avec plus ou moins d’aides fiscales pour limiter le chômage.
Des limites à la tertiarisation de l’économie ?
En France métropolitaine (FM), le secteur tertiaire avait déjà dévoré une très grande partie de l’économie en 1990 et procurait alors plus des 2/3 des emplois, 67,5% d’après les données de l’Insee. Ensuite sa progression, toujours vive, a fourni 74,2% des emplois en 2000, 78% en 2010 et 79,8% en 2019, soit 22,26 Mi emplois sur les 27,89 Mi de la FM.
C’est le tertiaire marchand qui s’est révélé le plus envahissant. De 1990 à 2019, son nombre d’emplois a été majoré de + 51%, atteignant 13,86 Mi et assurant aujourd’hui, à lui seul, 49,7% des emplois en FM.
En mai 2021, l’Insee a publié des séries de données trimestrielles apportant des précisions sur l’évolution de l’emploi salarié par secteurs en France (14).
Elles montrent que la croissance de l’emploi la plus forte, avec plus du doublement de leurs effectifs, a été enregistrée dans les Services scientifiques et techniques et services administratifs et de soutien qui, en 2019 ont employé 3,5 Mi de salariés. L’externalisation de ces activités par les entreprises explique en partie cette évolution.
L’information et la communication, autre secteur principalement au service des entreprises, a aussi été très dynamique. En 2019, l’emploi salarié y avait augmenté de presque + 80% depuis 1990. Servant aussi bien les entreprises et les administrations que les particuliers, le secteur
Hébergement et restauration employait 1,15 Mi de salariés au 4ème trimestre 2019, soit + 93% de plus qu’en fin 1990. Selon l’estimation (très) provisoire de l’INSEE, le secteur aurait ensuite perdu - 132 000 emplois salariés en 2020. Dans les autres secteurs, les effectifs des salariés ont cru nettement moins, entre + 10% et + 25% de 1990 à 2019 pour les Commerces et réparations automobiles, les Transport et entreposage, les Activités immobilières, ainsi que les Activités financières et d’assurance. La structure sectorielle de l’emploi a donc notablement changé au sein du Tertiaire marchand.
Dans le volumineux tertiaire non marchand, la place des Administrations publiques (APU) est prépondérante. Illustrant la « pression » exercée pour « maîtriser » les dépenses publiques au 21ème siècle, après avoir augmenté de + 15,8% de 1990 à 2000, le nombre des emplois a cru de + 9,0% les 10 ans suivants, puis de + 4,8% de 2010 à 2019, atteignant 8,40 Mi cette dernière année. Les séries rétrospectives trimestrielles de l’emploi salarié par secteur en France ne remontent que jusqu’à 2010. Depuis, de 2010 à 2019 : - c’est le nombre des emplois salariés pour l’Hébergement médico-social et l’action sociale qui a le plus augmenté, de + 6,5% environ ; - le nombre de salariés des services de Santé humaine a cru de presque + 6% ; - parent moins bien servi, l’Enseignement a vu le nombre de ses salariés augmenter de moins de + 3% ; - dans les services de l’Administration publique (administration générale, police, justice…), le nombre de salariés n’a pas augmenté.
Les activités tertiaires et l’emploi évoluent en fonction de l’état de la population
Dans le vaste tertiaire, l’impact du vieillissement de la population se remarque à l’importance de l’emploi pris dans un certain nombre d’activités. Selon les résultats publiés le 11 mai (13) de l’enquête emploi en continu de l’Insee, sur les 27 Mi d’emplois (à temps plein ou à temps partiel) en France en 2020, ceux des Activités pour la santé humaine ont été de 2,02 Mi et ceux de l’Hébergement médico-social et social et de l’action sociale sans hébergement ont été de 1,90 Mi.
Sur le portail de la Fonction publique

A ces emplois dans des activités dont le poids et la croissance sont liés à l’âge, à l’état de santé, à la dépendance et aux conditions sociales de la population, il convient d’ajouter une partie des emplois des Autres activités de service, au nombre de 684 000, et des activités des ménages en tant qu’employeurs, au nombre de 287 000.  Ainsi, c’est de l’ordre de 4,5 Mi d’emplois, soit de 1 emploi sur 6 qui est consacré à ces services.
Compte tenu du vieillissement encore attendu de la population, notamment, il apparait peu probable que cette proportion diminue dans l’avenir.

Les activités et l’emploi primaire et secondaire réduits à peau de chagrin
 
En France métropolitaine, l’emploi dans les secteurs primaire et secondaire (agriculture, industrie et construction) s’est rétréci de 32,5% de l’emploi total en 1990 à 25,8% en 2000, 22,1% en 2010 et 20,2% en 2019. L’Agriculture est descendue à 2,3%, l’Industrie à 11,7% et la Construction peine à 6,2%.
Dans l’Industrie, la plupart des secteurs supportent mal la concurrence internationale loyale et déloyale. Ce n’est pas la « mondialisation heureuse ». L’ouverture croissante, à l’intérieur de l’Union européenne (où le déficit des échanges persiste), tous azimuts à l’extérieur de celle-ci, la multiplication des accords de libre-échange, ainsi que la multinationalisation des entreprises et les délocalisations ont affaibli l’économie et l’emploi en France. La Chine a taillé des croupières dans de nombreux secteurs. Ainsi, dans celui des Textiles, habillement, cuirs, chaussures, de 439 000 emplois en 1990, le nombre d’emplois est tombé à 106 000 en 2019.
L’enquête emploi en continu de l’Insee (13) indique aussi qu’en 2020 en France, hors Mayotte, le nombre d’emplois est limité à 0,63 Mi dans l’Agriculture et à 3,52 Mi dans l’Industrie. La principale poche de résistance est l’industrie agroalimentaire, avec 0,64 Mi d’emplois. La Fabrication de matériels de transport, avec Renault, Peugeot, Airbus, notamment, et les sous-traitants, n’emploie plus que 383 000 personnes. L’Industrie chimique, c’est 161 000, l’Industrie pharmaceutique, 92 000. Malgré le « tout numérique » dans le public et le privé, la prolifération des ordinateurs, des tablettes et plus encore des téléphones portables intelligents, le nombre d’emplois dans la Fabrication de produits informatiques, électroniques et optiques ne dépasse pas 155 300 (moins de 0,6% du total des emplois) … et 110 700 dans la Fabrication d’appareils électriques (éoliennes comprises, sans doute). Grande faiblesse, donc, et dépendance de l’étranger dans des domaines présentés comme stratégiques.
Plus largement, pour satisfaire la consommation intérieure ainsi que les besoins en investissements, le recours aux importations remplace nos productions et nos emplois.
Jusqu’où ira ce grand remplacement ? Un pays aux dimensions de celles de la France peut-il se résigner à être privé de secteurs majeurs pour sa balance des échanges et porteurs de progrès technologiques qui irradient son économie ? Ne peut-on trouver de moyens plus efficaces que de coûteuses subventions, sans obligations et contreparties, à l’emploi et à la recherche qui ne font pas leurs preuves ? Notre industrie et notre agriculture peuvent-elles survivre aussi déprotégées ?
Des centaines d’heures de travail de moins par an par rapport à 1975
Une réduction impressionnante jusqu’en 2000
« Depuis 1975, le temps de travail annuel a baissé de 350 heures, mais avec des horaires moins réguliers et plus contrôlés » a exposé l’Insee dans France, portrait social Edition 2019 (18). Au total, il est descendu de 1 957 heures en 1975 à 1 609 h en 2018. Le tableau 4 montre aussi que le temps de travail des non salariés est nettement plus élevé que celui des salariés… et qu’il est descendu de plus de - 420 h en 43 ans.
L’essentiel de la baisse a été obtenu avant 2005 pour les salariés. Elle s’est poursuivie au-delà pour les non salariés.
La réduction du temps de travail n’a pas été un phénomène spontané. Le « partage du temps de travail » pour augmenter le nombre des emplois et limiter le chômage a été la principale motivation des gouvernants jusqu’en 2000. Ensuite, le vent a tourné et le mot d’ordre, cher à Sarkozy, est devenu « travailler plus pour gagner plus ».

Source : Insee, France, portrait social Edition 2019 (18). Champ France métropolitaine
Parmi les facteurs marquants de l’évolution, l’Insee souligne : - l’abaissement de 40 h à 39 h de la durée légale du travail et la généralisation de la 5ème semaine de congés payés par le gouvernement Mauroy en 1982 ; - accompagnant la montée du chômage des salariés, les mesures incitatives en faveur du temps partiel sur une période d’une dizaine d’années à partir de 1992 ; - la loi Aubry de 1998, fixant la durée légale hebdomadaire du travail à 35 heures au 1er janvier 2000 pour les entreprises de plus 20 salariés, et au 1er janvier 2002 pour les autres ; - à partir de 2004, les assouplissements des 35 h et les incitations aux heures supplémentaires.
Temps partiel : surtout pour les femmes, les jeunes et les séniors
La proportion des salariés à temps partiel a vivement cru de 1975 à 1999, montant de 6,6% à 18,1% en 14 ans. Ensuite, ce taux a peu évolué, atteignant 18,9% en 2018. Le temps partiel (TP) est l’apanage des femmes. En 1975, le taux des emplois salariés chez les femmes était de 14%. En 1999, il était de 32,3%. En 2018, il frôlait les 30%. Très faible en 1975, le même taux chez les hommes était de 2,1%. Il a cru jusqu’à 6,6% en 2010. En 2018, il était de 7,8%. Les jeunes salariés de 15 à 24 ans, d’une part, et les salariés de 55 ans et plus sont également des « adeptes », pas forcément volontaires, du TP. Leurs taux sont assez proches de ceux des femmes.
Des écarts de temps de travail importants entre femmes et hommes
Selon des données de l’Insee de juin 2020 (19), la durée de travail hebdomadaire moyenne était de 37,2 h en 2019. Celle des salariés, au nombre de 23,88 Mi, était de 36,2 h, et celle des 3,30 Mi indépendants, de 45 h.
Chez les indépendants et les salariés, le temps de travail des femmes est inférieur à celui des hommes. Chez les seuls salariés, c’est 34,1 h par semaine pour les femmes et 38,1 h pour les hommes, soit 12% de plus.
 C’est un élément à prendre en considération quand on compare les rémunérations. En 2019, le salaire mensuel net médian est de 1 570 € pour les femmes et de 1 900 € pour les hommes, soit + 21% de plus. L’écart est un peu plus élevé, + 24%, pour les salaires plus élevés du 3ème quintile de niveau de vie, et un peu plus faible, + 17,4%, pour les salaires plus bas du 1er quintile.
Des précisions selon le statut, la CSP et le sexe, notamment, en 2020
En raison de la pandémie et des mesures prises, de celles concernant le chômage partiel, en premier lieu, l’année 2020 est très particulière en matière d’emploi. La publication de l’Insee du 18 mars 2021 concernant les heures travaillées selon le statut, la CSP et le sexe en 2020 (20) contient cependant des infos intéressantes complétant celles présentées jusqu’ici.
En France (hors Mayotte), la durée annuelle effective de travail des salariés à temps partiel a été de 895 h en 2020, et leur durée habituelle hebdomadaire de travail, de 23,6 h. Chez les salariés à temps complet, ces chiffres sont de 1 568 h et 39,1 h.
Que ce soit à temps complet ou à temps partiel, la durée de travail des cadres et professions intellectuelles supérieures est supérieure à celles des professions intermédiaires, des employés et des ouvriers, de l’ordre de + 16% chez les salariés à temps complet.
Chez les salariés à temps complet et chez les indépendants la durée de travail des hommes a été plus élevée que celle des femmes. Au contraire, chez les salariés à temps partiel la durée de travail des femmes, 899 h, a un peu dépassé celle des hommes, 878 h, en 2020.
Salaires et Revenus d’activité dans les secteurs de l’économie
Dans l’Ensemble du secteur privé en France, le salaire mensuel net moyen en équivalent temps plein (EQTP) est de 2 370 € en 2018 et, en euros constants 2018, il est de + 3,5% supérieur à son niveau de 2013. C’est dans les Services mixtes que le salaire moyen net, 3 380 €, est le plus conséquent, et il a gagné + 5,3% en 5 ans. Le salaire moyen est le plus faible, 1 850 €, dans les Services aux particuliers, et il n’a augmenté que + 2,2% en 5 ans. Dans les autres secteurs le salaire moyen va de 2 150 € dans la Construction à 2 640 € dans l’Industrie. Le Revenu moyen mensuel de l’ensemble des non-salariés (hors micro-entrepreneurs), 3 820 €, est très supérieur à celui des salariés, et sa progression a été de + 15,4% en 5 ans. Les différences entre secteurs dans les niveaux de revenus moyens et dans les évolutions de ceux-ci sont très marquées. Dans la Santé et l’action sociale, le Revenu moyen est de 5 740 €, et il a augmenté de + 1,4%. Dans les Services aux entreprises et services mixtes, le Revenu mensuel est de 5 150 €, et il a fait un bond de + 20,6% depuis 2013. Les non-salariés des Services aux particuliers sont les plus mal payés, avec un Revenu moyen de 1 770 € en 2018, contre 1 550 (en euros constants 2018) en 2013.
Ces dernières données et celles qui précèdent, sont issues du Tableau de bord de l’Economie française 2021 (21).
Dans le secteur privé, les écarts de salaires mensuels entre CSP sont notables. Les niveaux des salaires médians sont de 3 338 € chez les cadres, 2 160 € chez les salariés des professions intermédiaires, 1 540 € chez les employés et 1 670 chez les ouvriers. Les écarts sont nettement plus faibles dans le 1er décile, et plus forts dans le 9ème décile.
Ce même Tableau de bord indique qu’en 2018 le salaire mensuel moyen net dans l’Ensemble de la fonction publique (FP) était de 2 300 € et que, conséquence de blocages prolongés, il n’avait augmenté que de + 1% en 5 ans. Le niveau moyen du salaire dans la FP hospitalière en était très proche, 2 310 €. Dans la FP d’Etat, le salaire moyen atteignait 2 570 €, tandis que dans la FP Territoriale, parent pauvre, il était de 1 960 € (21).
Les écarts de salaires femmes-hommes se réduisent progressivement
Insee Première de juin 2020 a été consacré à l’analyse fouillée (avec 10 tableaux détaillés, notamment) de ces écarts. Son titre, « Ecarts de rémunérations femmes-hommes : surtout l’effet du temps de travail et de l’emploi occupé », résume les principales explications de ces écarts. L’article montre aussi que de 1995 à 2017, les écarts se sont progressivement réduits dans le secteur privé et dans le secteur public. Le champ des données couvre la France métropolitaine, hors apprentis et stagiaires, hors agriculture, hors salariés des particuliers (22).
Sur les salaires en équivalent temps plein, les écarts ont été réduits de façon assez continue de 21,45% en 1995 à 16,76% en 2017 dans le secteur privé. Les écarts étaient nettement moins forts dans le secteur public, de 13,76% en 1995. Leur parcours a été hésitant, avec des baisses et des hausses. En 2011, par exemple, l’écart était de 14,38%. Il est passé « sous la barre » des 13% en 2016, et il était de 12,45% en 2017.
Ces chiffres en EQTP me paraissent les plus proches des écarts effectifs de rémunérations, bien qu’ils traduisent aussi des différences : - dans les emplois par CSP entre les salariés des deux sexes. Nous avons vu plus haut que l’emploi féminin progresse dans l’échelle des emplois ; - liées aux secteurs dans lesquels les salarié(e)s sont employés, ou aux métiers qu’elles ou ils exercent.  
Le calcul du Revenu salarial prend en compte les emplois à temps complet et ceux à temps partiel, en nettement plus grande proportion chez les femmes salariées (cf. tableau 4). Aussi, les écarts de salaires dont il rend compte sont plus forts. Ils se réduisent progressivement. En 1995, ils étaient de 33,72% dans le secteur privé et de 18,68% dans la fonction publique. En 2017, ils étaient, respectivement, de 27,23% et 16,36%.
Le recours fréquent à ces derniers chiffres pour sensibiliser l’opinion sur la persistance d’injustices inacceptables ne devrait pas être dépourvu des explications appropriées sur leur signification et les limites des comparaisons.
Paul KLOBOUKOFF                                                       Académie du Gaullisme                                                     le 30 mai 2021
 
Sources et références
(1) Avec la pandémie de Covid 19, nette baisse de l’espérance de vie et chute du nombre de mariages      Insee Première N° 1846      insee.fr/fr/statistiques/5347620     le  29/03/2021
(2) Population et structure de la population Séries chronologiques Résultats par sexe et par âge (yc Mayotte depuis 2014)      insee.fr/fr/statistiques/series/103088458      le 30/04/2021
(3) Population immigrée et étrangère par sexe et par âge Données annuelles de 1990 à 2020     insee.fr/fr/statistiques/2381759 #tableau-figure1     le 07/05/2021
(4) Activité, emploi et chômage en 2020 et en séries longues       insee.fr/fr/statistiques/5359497 ?sommaire=5359511
(5) Population selon le sexe et la catégorie socioprofessionnelle     insee.fr/fr/statistiques/2381478        le 18/03/2021
(6) Population immigrée et population étrangère en 1999   insee.fr/fr/statistiques/211856 ?sommaire=2118522#titre-bloc-13      le 07/02/2011
(7) Dares - Analyses Emploi et chômage des immigrés en 2011     travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2012-077pdf
(8) Etrangers - Immigrés     TEF édition 2020      file :///C:/Users/AppData/Local/Temp/TEF2020.pdf
(9) L’essentiel de l’immigration Activité, emploi et chômage des immigrés en 2019     file///C:/Users/HPPC-1/AppData/Local/Temp/1-Essentiel_activite_2019.pdf
(10) Immigrés et enfants d’immigrés   France portrait social, éd. 2019   insee.fr/fr/statistiques/4238373 ?sommaire=4238781 le 19/11/2019
(11) TCRED - Emploi au 31 décembre    insee.fr/fr/statistiques/series/102738928 ?ZONE-GEO=2320658
(12) Series chronologiques   Comptes nationaux annuels base 2014 -Produit intérieur brut - Evolution en volume       insee.fr/fr/statistiques/serie/010548503
(13) Caractéristiques des emplois en 2020    Insee Résultats       
(14) Estimations d’emploi salarié par secteur d’activité France Séries chronologiques insee.fr/fr/statistiques/series/103167884    le 07/05/2021
(15) Le Portail de la Fonction publique   Séries longues       fonction-publique.gouv.fr/series/longues      le 07/01/2021
(16) Marché du service à la personne : chiffres clés 2020, enjeux     appvizer.fr/magazine/services/services-personne     le 08/04/2021
(17) Les services à la personne en 2018      dares.travail-emploi.gouv.fr/publications/les-services-a-la-personne en 2018       le 27/02/2020
(18) Depuis 1975, le temps de travail a baissé de 350 heures…  France, portrait social Edition 2019      le 19/11/2019
(19) Activité, emploi et chômage en 2019 et en séries longues      insee.fr/fr/statistiques/4498601 ?sommaire=4498692      le 23/06/2020
(20) Heures travaillées selon le statut, la catégorie socioprofessionnelle et le sexe, données annuelles 2020     insee.fr/fr/statistiques/2491136#tableau-figure1_radio1
(21) Tableau de bord de l’Economie française -Salaires et revenus d’activité 2021     insee ;fr ;fr/outil-interactif/5367857/details/50_MTS/53_sra/53B_Figure 2
(22) Ecarts de rémunération femmes-hommes : surtout l’effet du temps de travail et de l’emploi occupé       Insee Première N° 1803 - Juin 2020       insee.fr/fr/statistiques/4514861

© 01.06.2021

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