Il est plus que temps de réduire
l’oppression fiscale
par Paul KLOBOUKOFF,
Si je reviens aujourd’hui sur la douloureuse question de la fiscalité, c’est parce que je fais partie « des près de 11 millions de contribuables profitant de la déclaration automatique des revenus » (DAR) pour lesquels elle serait « presque indolore. Car mis à part la vérification des revenus pré-remplis, aucune action ne vous est demandée. Pas même une signature pour valider l’intégralité des informations connues du fisc ». De quoi rester bouche-bée d’admiration devant ce choc de simplification !
Sur le site de yahoo/finance (1), on lit aussi : « Dit autrement : vous n’avez rien à faire… ou presque. Car encore faut-il être certain que vous êtes éligible à ce mécanisme lancé en 2020 et réservé aux personnes percevant des revenus « simples » (salaire, pension de retraite)… ».
Cependant, le formulaire de la DAR ne permet pas de déclarer, notamment : - les dépenses ouvrant droit à des crédits d’impôts, tels les services à la personne payés ; - les rattachements d’enfants majeurs ou mariés ; - les situations ouvrant droit à une demi-part supplémentaire. Aussi, le nombre de personnes pouvant « profiter » du choc de simplification en n’utilisant que la déclaration automatique des revenus est probablement très inférieur aux 11 millions de destinataires de la DAR. Les autres sont confrontés aux « affres » d’une déclaration plus complexe, éventuellement en sollicitant le concours de leur inspecteur des impôts pour les guider et/ou valider leur « copie ». Le risque pour ces contribuables est, en effet, de payer plus d’impôt sur le revenu qu’ils devraient. Cela ne dérangerait pas nos gouvernants, en quête perpétuelle de recettes supplémentaires.
Pour Macron et Attal, il n’y a pas assez d’impôts
A ce propos, les paroles prononcées par le président Macron le 17 avril pour expliquer le super déficit de 5,5% du PIB en 2023, « Nous n’avons pas un problème de dépenses excessives, mais un problème de moindres recettes » (2), est révélateur… et inquiétant. Eric Ciotti, le leader des Républicains, y a vu « un plan caché » pour relever les impôts. En fait, le but poursuivi n’est pas réellement caché, mais le « plan » est encore en gestation.
Le premier ministre Gabriel Attal en a dévoilé une des pistes le 2 avril en annonçant le lancement d’une mission d’étude sur la « taxation des rentes ». Pour tenter d’apaiser les inquiétudes aussitôt soulevées, parmi les retraités et les épargnants, en particulier, il a ensuite affirmé qu’il ne visait pas les Français qui travaillent ou le fruit de leur épargne. Ses cibles seraient les entreprises jouissant d’une rente de situation [???] et/ou les superprofits des entreprises qui bénéficient aux seuls actionnaires et non à l’investissement ou aux salariés. Cela n’apparait, évidemment, pas clair. Début avril, Tous Contribuables a donc consacré à ce sujet une Tribune intitulée « Taxation des rentes selon Gabriel Attal : la chasse aux profits est ouverte ! » (3).
Comme Macron a les propriétaires immobiliers dans le collimateur, ces derniers craignent une sur taxation des loyers (rentes obtenues sans effort ni mérite ?) qu’ils perçoivent. Ces cibles potentielles comprennent notamment des ménages qui complètent leur revenu du travail ou leur pension de retraite avec le loyer d’un studio qui est (ou a été) financé par l’emprunt et est soumis à une taxe foncière salée et galopante.
Ne rechignant pas à racler n’importe quels fonds de tiroirs, au Festival du livre de Paris, le 12 avril, Emmanuel Macron a annoncé une taxe de 3% sur les livres d’occasion. Cette décision a suivi de quelques heures seulement son appel à « relancer très fortement l’initiative pour la lecture » et d’en faire un « rituel quotidien pour les jeunes ». Dans sa tribune du 17 avril intitulée « La taxe sur les livres d’occasion, dernier avatar de la surenchère des mesures fiscales » (4), Erwann Tison, directeur de l’Institut Sapiens, a dénoncé l’aporie [contradiction, invraisemblance] en matière de politique économique. Estimé à 350 millions (Mi) d’euros, le marché du livre d’occasion a fait preuve de dynamisme (+ 30% en 5 ans). L’Etat peut ainsi espérer s’approprier un « magot » pouvant atteindre 10,5 Mi … En l’absence de toute « fraude fiscale ». Du sommet de l’Olympe, n’est ce pas descendre bien bas ?
La France est déjà championne d’Europe des prélèvements obligatoires
Dans sa livraison du 26 mars 2024 sur le « Poids des prélèvements obligatoires (PO)», l’Insee indique que ceux-ci ont représenté 45,2% du PIB en 2022 et 43,5% en 2023. Ces montants sont comptés hors cotisations sociales imputées (sur les prestations sociales directes que l’employeur fournit lui-même à ses salariés) et crédits d’impôts. C’est un funeste record !
De son côté, pour effectuer ses comparaisons internationales, Eurostat compte ces cotisations et ces crédits d’impôts. Aussi, elle évalue les PO de la France en 2022 à 48% du PIB, tandis que ceux de l’Allemagne sont à 42,1%, et ceux de l’ensemble des pays de la zone euro, à 41,9% (5). Cette surimposition française est un frein aux initiatives, à la compétitivité et à la croissance, ainsi qu’une source d’injustice sociale.
L’impôt sur le revenu (IR) : une sanction très sélective et trop progressive
Moins de 45% des foyers fiscaux (FF) paient l’IR. En 2023, sur les 41 Mi de foyers, seulement 18,2 Mi ont été redevables. Subséquemment, ils paient cher. L’impôt moyen a été de 4 663 euros (6). Cette concentration pourrait être acceptable si à cette sanction imposée aux classes moyennes principalement ne s’ajoutaient pas toutes celles consistant à restreindre des droits à de nombreuses prestations et les prix à acquitter en fonction du niveau des revenus. A mon avis, il y a overdose, et aucun recensement ni compte n’est fait de ces « inégalités » de traitement.
Quant à la progressivité de l’IR, elle se lit dans le barème, publié le 1er janvier 2024 par Service-Public.fr, applicable aux revenus de 2023… comme dans les barèmes des années précédentes. Car celui de 2024 comporte 5 tranches dont les limites ont été revalorisées uniformément de+ 4,8% en 2024 et de + 6,8% en 2023, suite aux poussées inflationnistes dont nous avons souffert.
Tableau - Barème progressif applicable aux revenus de 2023
Rien ne vous choque dans ce barème ?
Moi, ce qui me choque et me contrarie, c’est le bond géant entre les taux de 11% et 30% des 2ème et 3ème tranches et l’absence d’une tranche intermédiaire au taux proche de 21%. De la sorte, à partir d’un revenu imposable de 2 400 € par mois, le redevable est taxé à 30%. C’est inacceptable ! Je suis étonné que les syndicats et les partis politiques qui « défendent » le pouvoir d’achat des citoyens ne s’emparent pas de cette question très concrète.
Aussi, pour rétablir plus de justice sociale, il faut, sans attendre :
Réviser le barème de l’impôt applicable aux revenus de 2023 en y ajoutant une tranche
allant de 28 798 € à 55 000 € (environ) soumise au taux d’imposition de 20% ou de 21%.
Une loi de finances rectificative devrait le permettre. La minoration des recettes fiscales entraînée par ce réajustement pourrait être compensée par une pression sur les dépenses publiques faisant appel à plus de sélectivité, plus de rigueur… et moins de gaspillages.
Restes à charge doublés sur les médicaments et les actes médicaux
Ce dimanche 31 mars, la franchise par boite de médicaments est passée de 50 centimes à 1 euro et également sur les actes paramédicaux (des infirmiers, des masseurs-kinésithérapeutes, des orthophonistes, des orthoptistes, des pédicures-podologues…). Sur les transports médicaux, la franchise est montée de 2 euros à 4 euros (7).A partir du 15 mai la franchise va s’élever de 1 euro à 2 euros sur chaque consultation médicale, examen radiologique ou analyse biologique (8).
« Il n’y a pas de raison que les personnes qui ont besoin de soins ne contribuent pas aussi à la résorption du déficit de la Sécu (11,1 Mds € en 2023), que diable ! ». Ne dit-on pas que ce sont les petits ruisseaux qui font les grandes rivières ? En France, ils apportent aussi leurs filets d’eau au flot fiscal démesuré qui nous submerge.
*Paul KLOBOUKOFF Académie du Gaullisme Le 23 avril 2024
Sources et références
(1) Impôt sur le revenu 2023 : quel est ce mail envoyé par le fisc à 11 millions de Français ? fr.finance.yahoo.com/actualites/impot-revenu-2014-mail-envoye-134858877html ?...
(2) « Emmanuel Macron veut convaincre les Français que « trop d’impôt tue l’impôt » lefigaro.fr/vox/emmanuel-macron-veut… l-impot-20240417 ?...
(3) TRIBUNE :Taxation des rentes selon Gabriel Attal : la chasse aux profits est ouverte ! touscontribuables.org/les-combats-de-contribuables-associes/tribune-taxation-des-rentes-selon… le 04/04/2024
(4) « La taxe sur les livres d’occasion, dernier avatar de la surenchère de mesures fiscales » efigaro.fr/vox/la-taxe-sur-les-livres….le 17/04/2024
(5) Les prélèvements obligatoires en France et dans la zone euro en 2022 fipeco.fr/commentaire/Les-prélèvements… en 2022 le 15/11/2023
(6) Impôts : voici le montant moyen que les Français ont payé en 2023 msn.com/fr-fr/finance/other/impots-voici… source DGFIPle 17/04/2024
(7) Assurance maladie : le doublement des franchises médicales, comment ça marche leparisien.fr/economie/assurance-maladie-le-doublement… 31-03-2024
8) Consultation médicale : le reste à charge va passer de 1 euro à 2 euros à partir du 15 mai leparisien.fr/economie/consultation-médicale-le-reste…le 16/04/2024
© 01.05.2024