Contre l’ennemi public des retraités et des personnes âgées P. KLOBOUKOFF - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
Président-fondateur Jacques DAUER
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Contre l’ennemi public des retraités et des personnes âgées        

En résumé



par Paul KLOBOUKOFF,
Emmanuel Macron a été élu président en 2017 en partie non négligeable grâce aux votes des personnes âgées, des retraités. A l’avant-veille des élections d’avril-mai 2022, ils l’aident à « caracoler » à l’aise en tête des sondages. Pas rancuniers ou amnésiques ? Trop d’entre eux semblent ne pas voir que Macron ne les aime pas, qu’ils en ont été des victimes expiatoires. Aussitôt que « Jupiter » est monté au sommet de l’Olympe, il a relevé au 1er janvier 2018 de 6,6% à 8,3% le taux plein de la Contribution sociale généralisée (CSG) applicable à leurs pensions, sans contreparties. L’indignation et les manifestations, dont celles des gilets jaunes, l’ont forcé à revenir en partie en arrière.  Cela ne l’a pas retenu de poursuivre la « stratégie » de laminage des retraites de base en les revalorisant moins que l’inflation, pendant que l’Agirc-Arrco faisait de même pour les complémentaires. De la sorte, de 2014 et 2022, les pertes de pouvoir d’achat ont été en moyenne de - 5,5% à - 6,0% pour les retraites de base et d’environ - 7% pour les complémentaires. C’était une façon de remplacer une indispensable réforme des retraites après que son projet, mal préparé  et impraticable, ait été rejeté par les citoyens et les acteurs sociaux.
Le quinquennat Macron est entaché par deux épisodes tragiques qui ont mis en évidence de graves défaillances et des maltraitances dans des Etablissements d’hébergement des personnes âgées dépendantes (Ehpad). A côté de celles des gestionnaires des établissements, plus souvent privés que publics, la responsabilité de l’Etat a été pointée.
La tragédie dans les Ehpad de mars à mai 2020 parait complètement oubliée, ainsi que le sort réservé aux Ehpad publics et privés, à leurs résidents et à leur personnel. Au 11 mai, Santé publique France (SPF) faisait état  - de 73 435 cas de contamination chez les résidents, et de 13 539 décès, dont 3 551 en hôpital et 9 988 dans les établissements…  pour un nombre de résidents compris entre 700 000 et 800 000 ; - de 40 503 cas chez le personnel … pour 800 000 employé(e)s. On a pu lire alors « La situation actuelle des Ehpad est un véritable scandale d’Etat », ainsi que des descriptions telles « Une plongée glaçante dans l’univers de ces établissements […] où la peur du virus, les contaminations se mêlent à une forme de résignation face à la solitude et au manque criant de moyens, de personnels, de matériel ». La situation sanitaire y est « dramatique ».  « Nos anciens sont, une fois encore, les victimes silencieuses d’un Etat qui, ne jurant que par des logiques comptables, a délibérément affaibli notre système de santé et médico-social public ». Et encore, révélant la pratique d’un inacceptable tri sélectif, « A l’hôpital, faute de places et de moyens suffisants, on « rationalise » et les résidents d’Ehpad n’y sont donc pas accueillis : trop vieux, trop faibles, pout tenter le passage en réanimation ! Face à la maladie et à la mort, les établissements se sentent bien isolés et deviennent même des pièges qui se referment sur leurs résidents ».
La gestion avide de profits et les maltraitances des résidents dans des Ehpad du groupe privé Orpéa dénoncées dans le livre « Les Fossoyeurs » en décembre 2021 indiquent que la tragédie précédente a eu très peu de suites, de la part de l’Etat, en particulier, et que les Ehpad sont hors de contrôle. Comme si c’était le dernier des soucis des Autorités. Il est vrai que les personnes âgées dépendantes votent moins que les autres séniors. La sortie du livre a été suivie d’innombrables mises en accusation d’Orpéa, mais aussi du Groupe Korian, qui s’était déjà illustré dans la tragédie de mars à mai 2020, ainsi que d’autres Ehpad privés. L’ampleur de ce mouvement souligne l’étendue et la profondeur du mal qui ronge ce secteur, ainsi que la gravité de l’impuissance et/ou  l’inaction des Autorités.
Des actions concrètes étaient attendues en matière de contrôle des Ehpad et, plus encore, de législation en faveur de l’autonomie et du grand âge, ainsi que de moyens financiers, pour faire face aux enjeux immenses du vieillissement de la population. D’ici 2050 : - le nombre des 85 ans et + aura plus que doublé et atteindra 4,8 millions ; - 16,4% des séniors  pourraient être en perte d’autonomie ; - jusqu’à 700 000 personnes âgées pourraient se trouver en situation de dépendance lourde.
En juin 2020, lorsqu’on croyait à la promesse d’une ambitieuse « loi grand âge » et de la prise en charge de la dépendance (5ème risque) par la Sécu, l’estimation des besoins pour financer le grand âge s’élevait de 6 à 7 Mds € d’ici 4 ans et à 10 Mds € en 2030.
Le 9 novembre 2021, Macron a fait savoir que la loi grand âge ne serait pas pour demain. « Nous sommes en train de construire pas à pas un véritable service public de l’autonomie pour nos aînés ». Pour compenser cette reculade, des mesures importantes devaient être introduites dans le Projet de loi sur le financement de la Sécurité sociale 2022.
En fait, ces mesures se résument essentiellement à un « investissement » de 0,4 Md € associé aux objectifs de : - favoriser le maintien à domicile des personnes âgées [en majorant les tarifs des services d’aide à domicile !!!] ; - « transformer le modèle de l’EHPAD », mieux répondre aux besoins de personnel et de médicaments, recruter + 10 000 personnels soignants … d’ici 5 ans.
A l’évidence, les gouvernants actuels n’ont pas pris la mesure des dimensions des enjeux. Il faut espérer que leurs successeurs seront plus clairvoyants et déterminés. 0,4 Mds €, c’est une misère à côté des cadeaux électoraux du « candidat fantôme » qui, à quelques jours de la fin février n’a toujours pas déclaré sa candidature, mais qu’on voit un peu partout, jusqu’en Ukraine et en Russie, sous ses différents habits.
D’ici les élections présidentielles, il reste quelques semaines pour informer les séniors sur  ce que la Macronie leur a réellement apporté, sur ce qu’ils peuvent craindre, ainsi que sur ce que la France et ses citoyens peuvent redouter si Jupiter est réélu président… et, surtout, leur proposer un programme porteur de jours meilleurs.
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Du vote pour Macron à la désillusion et au mécontentement
Séniors, retraités : forte participation et vote favorable à Macron en 2017
 
Selon une enquête de l’Insee (1), 72,7% des électeurs ont voté aux deux tours des élections présidentielles de 2017. Les participations des personnes de 50 à 59 ans et celles de 60 à 74 ans, ont été respectivement de 79 à 79,9% et de 79,2 à 80,8%.  Celles des 75 à 79 ans ont atteint les 75%. Les participations des électeurs de 80 ans et plus ont été nettement plus faiblies, 57,8%.
Au premier tour de ces élections, François Fillon a eu la préférence de 34% des retraités qui ont voté et de 39% des votants de 65 ans et plus. Macron, lui, a recueilli 27% des votes des retraités, ainsi que 25% des votes des personnes de 50 à 64 ans et 26% de celles de 65 ans et +, selon une enquête de l’Ifop du 23 avril 2017 (2). Rappelons qu’à ce 1er tour, Macron avait obtenu  24,01% des suffrages exprimés.
Au second tour, contre Marine Le Pen, il a bénéficié des voix de 66% des votants de 50 à 64 ans, 76% de celles des 65 ans et +, ainsi que 74% de celles des retraités, selon une enquête Ifop du 8 mai.
Il a ainsi reçu un précieux appui des séniors pour se qualifier au 1er tour et pour distancer Marine Le Pen au 2ème tour.
A eux seuls, les 65 ans et plus constituent 1/4 du corps électoral. Les retraités de droit direct sont au nombre de 16,7 millions (en 2019). Malgré leur déception depuis 2017, la présidentielle est encore une élection majeure pour 87% d’entre eux, et même pour 95% des 75 ans et +. Aussi, les votes des séniors peuvent être déterminants aux élections de 2022. Il serait regrettable que, malgré l’hostilité de Macron à leur encontre, leurs suffrages lui profitent.
Trop ignorés, mécontents et inquiets, les séniors veulent être entendus
C’est ce qu’a révélé le 12 janvier sur senioractu.com (3) une enquête de l’Ifop sur « les séniors et la présidentielle » réalisée auprès des 50 ans et plus. 71% des séniors ont le sentiment de ne pas compter en tant que citoyens et pour 80% d’entre eux en tant que séniors.
Selon le directeur de l’Institut, Jérôme Fourquet, « L’augmentation de la CSG au début du quinquennat, les revalorisations à minima des pensions ont laissé des traces. Les retraités ont le sentiment de ne pas peser et de ne pas être entendus, d’être « une variable d’ajustement ».
Leurs priorités sont : - la santé, pour plus de 80% d’entre eux; - la sécurité, pour presque autant, surtout dans les grandes villes et les quartiers, ainsi que la lutte contre le terrorisme ; - l’éducation, les salaires et le pouvoir d’achat, pour 70% ; - la lutte contre le Covid et le chômage pour 65%. La protection de l’environnement n’est une priorité que pour environ 1 sénior sur 2.
S’ils veulent obtenir la faveur des séniors aux toutes proches élections, les candidats et les partis ont intérêt à les choyer : les écouter et les prendre en considération, les rassurer et leur parler avec franchise sur leurs intentions réelles à leur égard, engagements clairs et chiffrés à l’appui, si possible.
Le pouvoir d’achat des retraites a été réduit d’au moins - 6% de 2014 à 2022
Les retraites de base et les complémentaires ont été très peu revalorisées
 
Les revalorisations des retraites de base de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) ont été de : + 0,1% en 2015, + 0,8% en octobre 2017 ; + 0,4% au début 2019 ; en 2020, + 1,0% pour les retraités dont les retraites totales (de base et complémentaires) n’excédaient pas 2 000 € par mois (catégorie 1), ou + 0,3% pour celles qui dépassaient 2 014 € (catégorie 2), + 0,4% au 1er janvier 2021 , + 1,1% au 1er janvier 2022.
De janvier 2014 à janvier 2022, les retraites de base ont ainsi été revalorisées de + 3,857% pour les retraités de catégorie 1, et de + 3,137 % pour ceux de catégorie 2.
Pendant ce temps, l’Indice des prix à la consommation de l’INSEE (IPC) est monté de 99,24 en janvier 2014 à 108,12 en janvier 2022, soit de + 8,95%. La perte de pouvoir d’achat des retraites a été de - 4,67% pour les retraités de catégorie 1  et de - 5,34% pour ceux de catégorie 2.
Du côté des complémentaires, la valeur du point de retraite Agirc-Arrco est restée gelée à 1,2513 € depuis 2014 jusqu’à octobre 2018. Elle a été majorée de + 0,6% en novembre 2018 pour atteindre 1,2588 €. En novembre 2019, une nouvelle majoration de + 1,0% l’a portée à 1,2714 €, soit + 1,606% de plus qu’en 2014.  C’est encore sa valeur en janvier 2022… et pour presque toute l’année 2022.
Vu l’augmentation de l’IPC depuis janvier 2014, en janvier 2022, la perte de pouvoir d’achat est de  - 6,74% du montant des retraites Agirc-Arrco.  
Ces chiffres sont assez représentatifs des pertes de pouvoir d’achat de l’ensemble des retraites de 2014 à 2022. Ils sont corroborés par les tableaux que la DREES du ministère des Solidarités et de la Santé a présentés en janvier puis en mai 2021 sur la Revalorisation annuelle des pensions de retraite brutes de 2008 à 2019 (4). Sur la période 2014-2019, en euros constants (en tenant compte de la hausse des prix), les évolutions moyennes annuelles ont été respectivement de : - 0,8% pour les retraites de base, - 0,7% pour les retraites Agirc-Arrco, - 0,8% pour les RSI complémentaires des commerçants et des artisans, - 0,8% pour les retraites de l’IRCANTEC et - 0,4% pour les pensions de Retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP). Pour l’ensemble des régimes, la baisse moyenne annuelle a été de - 0,7%. En d’autres termes, de 2014 à 2019, au total, les pensions des différents régimes ont baissé en moyenne de - 3,5% en valeur réelle… et en pouvoir d’achat.
Le coup de Jarnac de la CSG contre les retraités a profondément choqué
En 2017, Macron a  décidé de relever au 1er janvier 2018 de 6,6% à 8,3% le « taux plein » de la CSG sur les pensions de retraite, sans aucune compensation. Cette majoration qui a fait baisser de - 1,7%, le pouvoir d’achat des retraites, a été vivement contestée par les retraités et les gilets jaunes, notamment, provoquant un rétropédalage partiel des Autorités, l’introduction d’un taux médian pour les années 2019 et 2020, et le remboursement d’une partie des « trop perçus ». Je n’ai pas trouvé d’évaluation globale de l’impact de ces décisions. D’après les infos de la DREES et mes calculs (5), à la suite du rétropédalage, la hausse de la CSG aurait eu un impact sur le niveau moyen des retraites d’au moins - 0,7%.
Dans ces conditions, de 2014 à 2022, les pertes de pouvoir d’achat ont été de - 5,5% à - 6,0% pour les retraites de base et d’environ - 7% pour les complémentaires. Les retraités ne pardonnent pas ce laminage délibéré.a
 
Encore une alerte sur la gestion des Ehpad en décembre 2021
Orpéa : de la recherche du profit maximum à la maltraitance des résidents
Après une enquête très fouillée de trois ans, dans son livre « Les Fossoyeurs », le journaliste indépendant Victor Castanets décrit les dérives lucratives de certains Ehpad du secteur privé qui ne reculent pas devant la maltraitance de leurs résidents dépendants pour maximiser leurs profits. Il précise que tous les Ehpad du pays ne sont pas des mouroirs où les « ainés » sont maltraités. Il concentre l’essentiel de ses attaques contre Orpéa avec une « plongée dans le « système Orpéa » (6) : obsession de la rentabilité, méthodes managériales condamnables… Orpéa est un mastodonte, numéro 1 mondial des Ehpad et des cliniques, comptant 65 000 collaborateurs dans 1 100 établissements, dont 220 Ehpad en France. Ses spécialités : rogner sur les dépenses, profiter de l’argent public, jongler avec les contrats de vacataires, établir des liens financiers avec ses fournisseurs…
Une ancienne auxiliaire de vie a raconté à francetvinfo (7) à quel point elle devait « se battre pour obtenir des protections » pour les résidents qui vivaient dans une « odeur de pisse ». « Nous étions rationnés : c’était trois couches par jour maximum (…) Peu importe que le résident soit malade, qu’il ait une gastro, qu’il y ait une épidémie »
Certaines maisons de retraite sont de « haut standing », à plus de 7 000 € par mois, comme la résidence Les Bords de Seine à Neuilly-sur-Seine où est morte la romancière Françoise Dorin des suites d’une escarre mal soignée (7).
 
Le groupe privé géant Korian également sur la sellette… et pas seulement
Sur bfmtv.com, l’article du 7 février intitulé « Scandale dans les EHPAD : une action collective en préparation contre le groupe privé Korian » (8) donne d’intéressantes infos sur des actions en préparation contre Orpéa et le groupe Korian. Maître Sarah Saldmann, avocate, qui prépare une action en justice conjointe contre Orpéa, a été contactée par 150 familles (à la date du 7 février) qui accusent Korian de maltraitances et souhaitent l’attaquer en justice. Elle est submergée d’appels visant des Ehpad privés et publics, principalement Orpéa et Korian, mais aussi, dans une moindre mesure, DOMUS Vi, 3ème groupe privé français.
« Il faut examiner chaque dossier, mais les chefs d’infractions sont non assistance à personne en danger, homicide involontaire, mise en danger délibérée de la vie d’autrui et violence par négligence, sachant que c’est individualisé pour chaque dossier », a indiqué l’avocate. Elle prévoyait de lancer une procédure en mars contre Orpéa et en avril contre Korian… qui intimiderait certaines familles. Il est donc possible que les médias nous reparlent de ces affaires scabreuses au moment des prochaines élections.
Vu le nombre élevé de « plaignants » potentiels, UFC-Que choisir a jugé utile de consacrer un article intitulé « Ehpad. Comment attaquer en justice » (9) aux procédures envisageables au pénal, au civil et en action de groupe.
 
De chers Ehpad « homologués » et des défaillances coupables de surveillance
Lors de la mise en chantier d’un nouvel Ehpad, une convention tripartite est établie entre l’exploitant, le Conseil général, l’Agence régionale de santé (ARS) ou le préfet, représentant tous deux l’Etat, rappelle l’article « EHPAD : coût d’une chambre en EHPAD » sur le site ehpad.com (10). Une convention tarifaire spécifique fixe un tarif hébergement, un tarif soin et un tarif dépendance. Ensuite, visiblement, l’Etat et les Conseils généraux manquent cruellement (pour des résidents) de vigilance quant à la « gestion » des Ehpad agréés.
De multiples facteurs interviennent dans la détermination du coût, qui est très variable d’un établissement à l’autre. Le coût moyen en France est de 95 € par jour (2 900 € par mois) pour un hébergement en chambre particulière, une assistance médicale 24 heures / 24, la restauration et l’animation. Dans une clinique privée, le tarif d’une chambre particulière est de 67 € / jour en moyenne, mais peut monter jusqu’à 200 € / jour.
Trouver un établissement à sa convenance est difficile, à cause des prix, mais aussi parce que les Ehpad affichent un taux moyen de remplissage de 96%.  
Une partie des coûts peut être couverte par des aides publiques aux résidents et à leurs familles provenant : - des  Conseils généraux, via l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA) et l’Aide sociale à l’hébergement (ASH) ; - de l’Assurance maladie via la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) ; - des ARS pour le remboursement de soins médicaux en Ehpad. L’attribution et les montants des aides sont soumises à conditions, de revenus et de patrimoine des intéressés, notamment. Pour y accéder, un parcours du combattant peut être de rigueur.
A titre d’exemple, les frais pour un budget de 35 000 € / mois comprennent :
 
-          11 667 € pour les soins (dont 2 007 € de soins de ville peuvent être remboursés par les ARS) ;
-          11 161 € pour l’hôtellerie ;
-          8 500 € pour l’accompagnement des actes de la vie quotidienne ;
-          2 600 € pour la vie sociale des résidents
Pour le résident et sa famille, « les prestations facultatives » (blanchissage du linge personnel, manucure, pédicure, coiffeur, internet depuis la chambre…) sont à ajouter à ces dépenses.
 
L’octroi des aides publiques aux établissements et aux résidents constitue une raison majeure supplémentaire pour que les Ehpad soient rigoureusement et assidument contrôlés.
 
La tragédie de mars à mai 2020 dans les Ehpad ne doit pas être oubliée
« Coronavirus : tant pis pour les vieux et les plus fragiles » était le titre de mon article publié dans la Lettre du 18 juin du mois de juin 2020. Le sort réservé aux Ehpad publics et privés, à leurs résidents et à leur personnel avait alors provoqué l’indignation et avait été qualifié de scandale d’Etat. Des poursuites devaient être engagées contre des responsables, et l’on devait espérer qu’instruites par l’expérience les « Autorités compétentes » veilleraient sur ces établissements ainsi qu’aux moyens indispensables pour en assurer un fonctionnement satisfaisant. 18 mois plus tard, cette sombre affaire est totalement « sortie des radars »… comme si rien d’anormal ne s’était passé. Et il a fallu « Les Fossoyeurs » pour alerter le public et les « Autorités compétentes » sur ce qui se passe dans certains Ehpad.
Les drames du printemps 2020 dans les Ehpad ne doivent pas être oubliés. C’est pourquoi j’ai reproduit ci-après la soixantaine de lignes que je leur avais consacrées dans mon article de juin 2020.
 
Pourquoi cette tragédie dans les EHPAD ?
Le plan bleu a été déclenché dans les EHPAD par le ministre de la Santé le 6 mars. Les aides et les masques n’ont pas afflué pour autant, car ce plan est essentiellement un outil d’organisation et de gestion interne des établissements médicaux et sociaux.  Un arrêté du 7 juillet 2005 l’a rendu obligatoire en cas de crise sanitaire ou climatique.  
Les visites ont été interdites dans les établissements concernés le 11 mars. Le 28 mars, Il leur a été demandé d’isoler les résidents en chambre individuelle. Le 19 avril les visites ont été autorisées, sous conditions (11).
Dans les EHPAD et autres EMS, SPF faisait état au 11 mai, chez les résidents : - d’un nombre total de 73 435 cas, dont 35 437 confirmés et 9 227 hospitalisés ; - de 13 539 décès, dont 3 551 en hôpital et 9 988 dans les établissements.
La population des résidents est visiblement mal connue (et/ou pas précisément délimitée). Les uns la chiffrent à 700 000, le Premier ministre à 750 000 et l’INSEE à 800 000. Le pourcentage de résidents contaminés était ainsi de l’ordre de 10%, et celui des décès de 1,8%... des proportions, très variables suivant les établissements.
Le point de SPF indiquait aussi que chez le personnel, le nombre total de cas était de 40 503, dont 19 156 confirmés. 800 000 personnes seraient employées dans les établissements. 5% auraient donc été contaminées.
Ces chiffres parlent d’eux-mêmes. Mais ils sont désincarnés. Le 13 mai, sous le titre « La situation actuelle des Ehpad est un véritable scandale d’Etat » Le Monde a publié une tribune qui évoquait la vie sous confinement dans une EHPAD de la Seine-Saint-Denis, décrite par une journaliste, grand reporter à Libération. « Une plongée glaçante dans l’univers de ces établissements […] où la peur du virus, les contaminations se mêlent à une forme de résignation face à la solitude et au manque criant de moyens, de personnels, de matériel » (12). La situation sanitaire y est « dramatique ». La tribune accuse : « Nos anciens sont, une fois encore, les victimes silencieuses d’un Etat qui, ne jurant que par des logiques comptables, a délibérément affaibli notre système de santé et médico-social public ». Et encore, « A l’hôpital, faute de places et de moyens suffisants, on « rationalise » et les résidents d’Ehpad n’y sont donc pas accueillis : trop vieux, trop faibles, pout tenter le passage en réanimation ! Face à la maladie et à la mort, les établissements se sentent bien isolés et deviennent même des pièges qui se referment sur leurs résidents ».

Manque de masques et de tests de dépistage, prise en charge à l’hôpital à géométrie variable, moyens limités dans certains établissements, Le Monde avait déjà publié le 6 mai une enquête sur le drame du coronavirus dans les EHPAD. Familles, directeurs, soignants et médecins estimaient avoir mené « une guerre sans armes » sur « un front sous-estimé » par le gouvernement avec des « directives ministérielles peu claires, inadaptées » et « corrigées » trop tard. Des vies auraient pu être épargnées. « Force est de constater que quand Véran a repris nombre de nos demandes, l’administration a déroulé derrière. Mais on a perdu un mois et demi. Un retard à l’allumage, sans lequel on peut penser qu’il y aurait eu moins de morts » (15). .
Pour Marie-Sophie Desaulle, présidente de la Fédération des établissements hospitaliers privés et d’aide à la personne (Fehap) aussi « Il y a eu un retard coupable de la prise en compte de la situation dans les EPHAD ». Elle estimait que le gouvernement n’était pas le seul fautif, car « A chaque crise sanitaire, la France a pour réflexe de privilégier la filière des soins, donc l’hôpital. A l’inverse, les pays nordiques de culture anglo-saxonne, l’Allemagne notamment, prennent d’abord en compte la situation des personnes vulnérables ».
Des plaintes visant l’Etat et des ARS, ainsi que des EHPAD privés « lucratifs » ont commencé à être portées par des proches des victimes, mais aussi par des associations, des collectivités… Leur nombre s’est accru depuis.
Le groupe Korian, principale chaîne d’EHPAD en France, est particulièrement dans le collimateur pour sa gestion de la crise ainsi que pour l’insuffisance de protection des patients et de son personnel soignant. Le 27 avril, on comptait 606 décès, essentiellement en Ile-de-France et dans le Grand-Est, dans ses maisons de retraite, qui hébergent 23 000 personnes. Au moins 40 décès, pour 109 résidents, sont décomptés à l’EHPAD de Mougins (Alpes maritimes).
Ce groupe n’est pas le seul où de fortes proportions de victimes sont à déplorer et contre lequel des plaintes sont déposées. Le 13 avril, sur ses 64 résidents, l’EHPAD de la Verpillière comptait 17 morts.
« Des avocats plaident pour un regroupement des plaintes contre les Ehpad » a titré un article du 23 mai sur 20minutes.fr (16). Trois parquets distincts (Grasse, Nanterre et Paris) ont ouvert des enquêtes depuis fin mars pour « mise en danger de la vie d’autrui ». Sont visées, les « politiques délibérées décidées aux sièges des sociétés cotées qui exploitent les Ehpad », mais aussi « la carence de l’Etat et les négligences des Agences régionales de santé ». Est-il préférable de localiser l’instruction des plantes en un seul parquet ? L’important est que les instructions nécessaires aient effectivement lieu et qu’elles aboutissent.
 
Loi en faveur de l’autonomie et du grand âge renvoyée aux calendes grecques
Comment et pourquoi Macron a passé le projet de loi « Grand âge » à la trappe
Sur lemonde.fr, un article du 31 novembre 2021 (17) raconte comment et pourquoi ce projet de loi préparé avec attention a été enterré vivant par Macron le 9 novembre. Ce jour là, vantant son bilan, il a déclaré « Nous sommes en train de construire pas à pas un véritable service public de l’autonomie pour nos aînés ».  C’est avec ce courage qu’il s’est exonéré de sa promesse de porter une loi sur la dépendance faite en juin 2018 et répétée en fin 2020.
Divers arguments ont été avancés pour tenter de justifier ce passage à la trappe du projet de loi. Le pompon revient sans doute à un de ses proches, qui a affirmé « Macron est convaincu depuis des années qu’il faut lier réforme des retraites et loi grand âge. Il n’en démord pas ». Avec Macron, cette loi attendra donc les calendes grecques.
Pour compenser la reculade, la ministre déléguée à l’Autonomie, Brigitte Bourguignon, a annoncé avoir introduit des mesures en faveur du grand âge dans le Projet de loi sur le financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2022).
 
Un PLFSS 2022 pas à la hauteur des besoins pour l’Autonomie et le Grand âge
Selon les annonces de début septembre 2021 de Jean Castex, ce PLFSS contient d’importantes mesures en faveur du grand âge. Un investissement de plus de 0,4 Md € sera consacré par l’Etat pour l’autonomie et le maintien à domicile dès 2022. Les objectifs visés sont : - favoriser le maintien à domicile des personnes âgées [en majorant les tarifs des services d’aide à domicile !!!]. La Sécurité sociale disposera de 0,25 Md € pour la nouvelle branche autonomie ; - transformer le modèle de l’EHPAD, mieux répondre aux besoins de personnel et de médicaments, assurer le recrutement de + 10 000 personnels soignantsd’ici 5 ans.
Pour Alliance VISTA (18), c’est très insuffisant [pour moi, c’est dérisoire] pour faire face aux enjeux immenses du vieillissement de la population. Par rapport à 2017, en 2050, le nombre des 85 ans et + aura été multiplié par 3,2 et atteindra 4,8 millions (rapport Libault, mars 2019). Depuis 2017, le nombre des personnes de 60 ans et + isolés des cercles familiaux et amicaux a doublé (baromètre des Petits Frères des Pauvres).
Selon l’Insee, d’ici à 2050, 16,4% des séniors pourraient se trouver en perte d’autonomie, et jusqu’à 700 000 personnes âgées pourraient être en situation de dépendance lourde. En juin 2020, l’estimation des besoins pour financer le grand âge s’élevait de 6 à 7 Mds € d’ici 4 ans et à 10 Mds € en 2030 (19).
Il est vraiment temps que cessent les atermoiements et que l’Etat, avec les collectivités locales et les citoyens, prenne le problème à bras le corps. Espérons que ce sera une des priorités du prochain gouvernement.
*Paul KLOBOUKOFF  Académie du Gaullisme  le 24 février 2022
NB : Guerre en Ukraine : Macron peut-il prévenir aujourd’hui les Européens, comme il l’a si modestement fait le 7 novembre 2019, que « nous vivons actuellement la mort cérébrale de l’Otan » ?
 
Sources et références :
(1) Participation aux élections présidentielles par âge en 2017      insee.fr/fr/statistiques/240957
(2) Election présidentielle française de 2017    wikipedia/wiki/Election_presidentielle…
(3) Les séniors et la présidentielle - Sondage Notre Temps       senioractu.com/Les-seniors -et-la-presidentielle…       le 12/01/2022
(4) Fiche 04 -la revalorisation des pensions individuelles     DREES ministère des Solidarités et de la Santé   2021- 01
+ Fiche 04 - La revalorisation des pensions individuelles    DREES    2021 - 05
(5) Président des riches, ennemi des retraités      La Lettre du 18 juin du mois de novembre 2021  
(6) « Les Fossoyeurs », un livre qui ouvre le débat sur la gestion et le contrôle des maisons de retraite       lemonde.fr/idees/article/2022/01/24/les-fossoyeurs…
(7) Maltraitance dans les Ehpad : trois questions sur « Les Fossoyeurs », le livre qui fait trembler le géant français Orpéa     francetvinfo.fr/sante/senior/les-fossoyeurs-trois…    le 25/01/2022
(8) Scandale dans les Ehpad : une action collective en préparation contre le groupe privé Korian    bfmtv.com/police-justice/scandale….     le 07/02/2022
(9) Ehpad. Comment attaquer en justice      quechoisir.org/actualite-ehpad-comment-attaquer-…    le 13/02/2022
(10) EHPAD : coût d’une chambre en EHPAD      ehpad.com/cout-chambre-ehpad     le 15/02/2022
(11) Plan bleu, c’est quoi, exemple, dans quels Ehpad ?    journaldesfemmes.fr/fiches-maladies/2424771-plan-bleu…    le 29/05/2020
(12) « La situation actuelle des Ehpad est un véritable scandale d’Etat »    lemonde.fr/idees/article/2020/04/13/la-situation…     
(13) Les vieux ont-ils été privés de réa ?     lesalonbeige.fr/les-personnes-agees-privees-de-soins…    le 22/04/2020
(14) Coronavirus : quand l’ARS conseille de laisser mourir I Le Média     lemediatv.fr/articles/2020/coronavirus-quand…    le 28/04/2020
(15) « On a vécu une tragédie » : pourquoi les Ehpad paient un si lourd tribut à l’épidémie du coronavirus    lemonde.fr/societe/article/2020/05/06/on-a-vecu….
(16) Des avocats plaident pour un regroupement des plaintes contre les Ehpad    20minutes.fr/justice/2784627-2020-05-23-coronavirus
(17) Loi « grand âge » : histoire d’une promesse non tenue     lemonde.fr/societe/2021/11/30/loi-grand-age…
(18) PLFSS : des mesures pour soutenir l’autonomie en attendant une loi grand-âge     alliancevita.org/2021/10/plfss-des-mesures…       le
(19) Le risque de dépendance bientôt pris en charge par la Sécurité sociale    bonjoursenior.fr/actualites/le-risque…    le 02/06/2020

© 01.03.2022

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