CE QU’EST LE GAULLISME !
Par Sébastien Nantz,
Beaucoup se réclament de l’héritage du général de Gaulle sans savoir réellement ce que recouvre le gaullisme de conviction.
Nous pensons qu’il est temps d’expliquer clairement sur quoi celui-ci repose.
Contrairement à la caricature que l’on nous prête quotidiennement, le gaullisme n’est nullement la volonté de revenir à une politique menée dans les années 60 ! Le gaullisme a une vision qui s’ajuste sans commune mesure à la modernité et aux problèmes de la France d’aujourd’hui !
Néanmoins celui-ci est basé sur des principes et des convictions fortes qui font qu’une personne s’en affranchissant ne pourrait légitimement se réclamer de cet héritage.
Le gaullisme ce n’est pas un pragmatisme à tout va qui ferait alors que tout le monde pourrait s’en réclamer.
Il est surtout basé sur les 4 axes qui constituent ce dont pourquoi le général de Gaulle s’est toujours battu :
1) L’indépendance nationale
Le premier axe du gaullisme de conviction est l’indépendance nationale.
Comment se réclamer du général de Gaulle lorsque l’on défend une vision de la France et de l’Europe radicalement différente de la sienne ? Tel est bien le cas de beaucoup de défenseurs de l’Europe supranationale, symbolisée par le Traité de Constitution Européenne et le Traité de Maastricht, qui n’hésitent pas à se revendiquer « gaulliste ». Il ne suffit pas d’admirer une personne pour se réclamer de son héritage politique.
Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, telle est la ligne directrice du gaullisme, conception qui ne vaut pas que pour les autres pays mais également pour la France.
Quelle était la vision du général de Gaulle sur l’Europe ? L’intéressé est sans doute le mieux à même pour y répondre.
« Après tant de leçons, on pourrait penser que, la guerre finie, les milieux qui prétendent conduire l’opinion se montreraient moins disposés à la subordination. Il n’en n’est rien. Au contraire ! Pour l’école dirigeante de chaque parti politique, l’effacement de notre pays est devenu une doctrine établie et affichée. Tandis que du côté communiste, il est de règle que Moscou a toujours raison, toutes les anciennes formations professent le « supranational », autrement dit la soumission de la France à une loi qui ne serait pas la sienne. De là, l’adhésion à « l’Europe » vue comme une construction dans laquelle des technocrates formant un « exécutif » et des parlementaires s’investissant du législatif -la grande majorité des uns et des autres étant formée d’étrangers – auraient qualité pour régler le sort du peuple français. De là, aussi, la passion pour l’organisation atlantique qui mettrait la sécurité, par conséquent la politique, de notre pays à la discrétion d’un autre. De là, encore, l’empressement à subordonner les actes de nos pouvoirs publics à l’agrément d’institutions internationales où, sous les apparences de délibérations collectives, s’exerce en toutes matières, politiques, militaires, économiques, techniques, monétaires, l’autorité suprême du protecteur et où nos représentants, sans jamais dire : « nous voulons », ne feraient que « plaider le dossier de la France ». De là, enfin, l’incessante irritation provoquée dans le gent partisane par l’action que je vais mener au nom d’une nation indépendante. » Charles de Gaulle, Mémoires d’Espoir
La politique européenne du général de Gaulle est toute entière résumée par le fameux compromis du Luxembourg, conséquence de la crise de la chaise vide, celle-là même étant causée par la volonté des autres nations européennes d’appliquer le vote à la majorité qualifiée.
Extension du vote à la majorité qualifiée repris dans la 1ère partie du TCE rejeté par les français le 29 mai 2005 et qui figure dans le traité de Lisbonne voulu par le Président de la République !
Ainsi, peut-on véritablement se réclamer du gaullisme en étant favorable à ce système de vote à la majorité qualifiée que combattait le général de Gaulle, qui fait de l’Europe une super nation et de la France .
La réponse est évidente !
un länder dont les représentants ne feraient que plaider sa cause sans jamais dire « nous voulons » où opposer son véto ?
L’Europe souhaitée par le général de Gaulle s’orientait sur les réalités et la réalité est que l’Europe est composée de nations, c’est par elles et non contre elles que l’Europe doit se faire donc l’Europe ne peut être que celles des nations !
« Pour pouvoir aboutir à des solutions valables, il faut tenir compte de la réalité. La politique n’est rien d’autre que l’art des réalités. Or, la réalité, c’est qu’actuellement, l’Europe se compose de nations. C’est à partir de ces nations qu’il faut organiser l’Europe et, s’il y a lieu, de la défendre. Au lieu d’une fusion intolérable et impraticable, pratiquons l’association. En poursuivant des chimères, on a déjà perdu des années. » Charles de Gaulle, conférences de presse tenue à l’Hôtel Continental, 25 février 1953.
2) Un État fort et dirigé
Le deuxième axe de la politique gaullienne tourne autour des institutions.
Des institutions qui font du Président de la République non plus l’inaugurateur des chrysanthèmes comme sous la IIIe et IVe République mais le véritable Chef de l’État se situant au-dessus des partis politiques.
« C’est donc du chef de l’État, placé au-dessus des partis que doit posséder le pouvoir exécutif. Au chef de l’État la charge d’accorder l’intérêt général quant au choix des hommes avec l’orientation qui se dégage du Parlement. A lui la mission de nommer les ministres et, d’abord, bien entendu, le Premier, qui devra diriger la politique et le travail du Gouvernement. Au chef de l’État la fonction de promulguer les lois et de prendre les décrets, car c’est envers l’État tout entier que ceux-ci et celles-là engagent les citoyens. A lui la tâche de présider les Conseils du Gouvernement et d’y exercer cette influence de la continuité dont une nation ne se passe pas. A lui l’attribution de servir d’arbitre au-dessus des contingences politiques, soit normalement par le conseil, soit, dans les moments de grave confusion, en invitant le pays à faire connaître par des élections sa décision souveraine. A lui, s’il devait arriver que la patrie fût en péril, le devoir d’être le garant de l’indépendance nationale et des traités conclus par la France. » Charles de Gaulle, Discours prononcé à Bayeux le 16 juin 1946.
Contrairement à ce qu’on peut souvent entendre, la Ve République n’est nullement responsable de la situation politique de la France. La Ve République est devenue ce que les hommes politiques ont voulu en faire car nos institutions n’ont de cesse été modifiées.
Qui se souvient que sous la présidence de Gaulle, de 1959 à 1969, deux gouvernements, conduits par Pompidou, ont été renversées par sa propre majorité ? Pourrait-on imaginer une telle situation de nos jours ?
Le régime des partis que le général de Gaulle dénonçait l’a emporté et impose sa prééminence encore plus fort que jadis !
Après la cohabitation, le quinquennat a fini de travestir la Ve République l’écartant définitivement de sa véritable nature. L’inversement dans le calendrier fait que les législatives n’ont plus beaucoup d’intérêts ce qui traduit sans doute le faible taux de participation lors de la dernière législative en date.
Défendre la Ve République c’est défendre ses institutions d’origines, sa nature, ses fondements et non son chiffre.
3) La 3ème voie sociale
Le 3ème axe porte sur une alternative dans le domaine économique et social, une 3ème voie.
Plus communément connue comme « Association capital-travail » ou « participation », le gaullisme défend une vision de la politique économique et sociale qui s’oppose à la fois au système capitaliste (dans lequel les patrons détiennent le pouvoir et le capital) et au système socialiste (où l’État concentre entre ses mains la réalité des décisions et des moyens).
3ème voie économique dont les Pompidolistes ont, à l’époque, empêché sa mise en place.
La participation n’est nullement la traduction d’un capitalisme populaire comme le pensent ou le présentent quelques-uns mais bien une alternative aux deux systèmes classiques.
« Il y a une troisième solution : c’est la participation, qui elle, change la condition de l’homme au milieu de la civilisation moderne. Dès lors que les gens se mettent ensemble pour une œuvre économique commune, par exemple pour faire marcher une industrie, en apportant soit les capitaux nécessaires, soit la capacité de direction, de gestion et de technique, soit le travail, il s’agit que tous forment ensemble une société, une société où tous aient intérêt à son rendement et à son bon fonctionnement et un intérêt direct.
Cela implique que soit attribué de par la loi, à chacun, une part de ce que l’affaire gagne et de ce qu’elle investit en elle-même grâce à ses gains. Cela implique aussi que tous soient informés d’une manière suffisante de la marche de l’entreprise et puissent, par des représentants qu’ils auront tous nommés librement, participer à la société et à ses conseils pour y faire valoir leurs intérêts, leurs points de vue et pour y faire valoir leurs propositions. C’est la voie que j’ai toujours cru bonne. C’est la voie dans laquelle j’ai fait déjà quelques pas ; par exemple, en 1945, quand, avec mon gouvernement, j’ai institué les comités d’entreprises, quand, en 1959 et en 1967, j’ai, par des ordonnances, ouvert la brèche à l’intéressement. C’est la voie dans laquelle il faut marcher. » Charles de Gaulle entretien avec Michel Droit 1968
Elle traduit la volonté d’associer le progrès économique avec la justice sociale.
La participation porte également sur le rôle important que doit tenir les acteurs économiques et sociaux dans la vie de notre nation, en associant dans une même chambre d’une part les représentants des collectivités locales et des activités régionales, d’autre part, des représentants des grands organismes d’ordre économique et social du pays.
Une assemblée qui rassemblerait alors toutes les forces vives de la nation.
4) La 3ème voie politique
Enfin le 4ème axe traduit le positionnement politique.
Le gaullisme n’est ni de droite, ni de gauche ou plutôt peut être considéré comme de gauche et de droite à la fois. Il ne vise pas au rassemblement exclusif des gaullistes mais au rassemblement du peuple français autour de la France donc par-delà les clivages et querelles partisanes puisqu’il agit dans l’intérêt général du pays et non pour l’intérêt d’un clan politique ou d’une catégorie de la population.
Ce rassemblement ne peut donc s’inscrire à travers une majorité qui se revendique de droite ou de gauche.
« Le RPF n’est pas un parti. S’il en était un, nous serions exclusifs. Nous ne rassemblerions pas les Français mais uniquement des militants. » Charles de Gaulle
C’est pourquoi nous déplorons de voir quelques personnes, se réclamant de la pensée du général de Gaulle, affirmer que se placer au-dessus des clivages droite-gauche n’existe pas et qu’il faut forcément choisir entre un camp et l’autre. Cette vision de la politique n’est nullement celle du général de Gaulle mais de Georges Pompidou qui fut l’inventeur de cette fameuse étiquette « majorité présidentielle » transformant malheureusement le président de la République en chef d’une majorité politique !
« La France, c’est tout à la fois, c’est tous les Français. C’est pas la gauche, la France ! C’est pas la droite, la France ! Naturellement, les Français comme de tout temps, ressentent en eux des courants. …Prétendre faire la France avec une fraction, c’est une erreur grave, et prétendre représenter la France au nom d’une fraction, cela c’est une erreur nationale impardonnable » Charles de Gaulle, 15/12/1965
« On ne peut pas être vraiment Gaulliste si on est de gauche, ni si on est de droite. Être Gaulliste, c’est être ni à gauche, ni à droite, c’est être au-dessus, c’est être pour la France » Charles de Gaulle
Le gaullisme est donc une force de rassemblement !
Enfin, pour conclure, être gaulliste c’est passer un partenariat loyal mais avec la France, uniquement et non avec une majorité politique ! C’est agir avec la volonté de voir s’unir le peuple français et avoir pour seule ambition le redressement national et la grandeur de la France !
*Sébastien Nantz Rassemblement pour la France (RPF
© 01.11.2021