Libertés communales : avis de décès J.Myard - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
Aller au contenu
Libertés communales : avis de décès       
         
L’article 72 de la Constitution dispose :
  
Alinéa 1 « Les collectivités   territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions,   les collectivités à statut particulier… »
  
Alinéa 3 « Dans les conditions   prévues par la loi, ces collectivités s’administrent librement… »
  
La réalité est, désormais, très loin des   dispositions de l’alinéa 3 ; les Français n’en ont pas conscience, alors même   que leur liberté en dépend. Il est temps de réveiller les consciences : la   démocratie communale est en danger de mort. Il est impératif d’en expliquer   les raisons.
  
La démonstration est technique, elle conduit   à une conclusion politique d’évidence : la fin des libertés communales au   profit de la technostructure étatique sous la férule de Jupiter.
  
1) Main basse sur les ressources   fiscales des communes
  
Suppression de la taxe d’habitation (TH),   c’est un impôt payé par tous, que vous soyez propriétaire ou locataire, il   représente 25 à 30 % des ressources des communes.
         
L’État s’est engagé à compenser la diminution   des recettes par l’affectation aux communes de la part départementale de la   taxe foncière (TF), ce qui ne comble pas la perte des recettes de TH.
  
L’État s’engage à combler la différence : TH   moins TF (départementale) par le versement d’une dotation prélevée sur le   budget de l’État.
  
Là est le piège car les communes n’ont aucune   garantie que cette dotation soit pérenne. Les communes ont connu l’amère   expérience de la dotation créée pour compenser la suppression de la taxe sur   les salaires lors de la création de la TVA.
  
Or, la dotation a été réduite à chaque vote   des lois de finances.
  
2) Main basse sur les ressources des   intercommunalités
  
Toutes les communes sont aujourd’hui   regroupées, souvent par force, dans des intercommunalités (EPCI) qui ont des   compétences d’attribution déterminées par la loi, comme par exemple le   ramassage et le traitement des ordures ménagères qui représentent une dépense   majeure des intercommunalités.
       
 Pour faire face à leurs dépenses, les intercommunalités ont reçu l’affectation des impôts économiques, dont l’ancienne taxe professionnelle (TP), devenue la contribution foncière des entreprises (CFE), à laquelle il faut ajouter la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), impôt national à taux progressif.

Ces impôts sont des impôts dits « de production » puisqu’ils concernent les entreprises. Pour alléger les charges des entreprises, la loi de finances pour 2021 a procédé à des abattements complexes au bénéfice des entreprises et en précisant qu’en 2021, le budget de l’État compenserait la perte de recettes des intercommunalités.

Cette politique d’abattement des impositions sur nos entreprises se justifie, certes, pour améliorer leur compétitivité, mais les intercommunalités n’ont aucune garantie d’avoir des compensations pérennes, les lois de finances successives pourront les modifier, comme pour la fameuse DGF (dotation globale de fonctionnement) …
 
3) Conséquences de la baisse des ressources des intercommunalités sur les communes.

Les intercommunalités ont des compétences d’attribution qu’elles assument avec leurs ressources – essentiellement la CFE et la CVAE, dont le produit dépasse leurs dépenses -, le surplus des ressources fait l’objet d’un retour aux communes. Ce retour s’appelle les attributions de compensation.
 
En conséquence, la diminution des ressources des intercommunalités réduit d’autant les ressources des communes !

4) Diktat en matière de logement social
 
Les lois ALUR (21 février 2014) , Égalité et Citoyenneté (27 janvier 2017) et ELAN (23 novembre 2018) confèrent aux intercommunalités la mission d’attribution des logements sociaux et la gestion des demandes.

À cette fin, une convention intercommunale d’attribution (CIA) doit être élaborée qui stipule nombre d’obligations, dont celle d’attribuer 25 % des logements aux publics prioritaires. De plus, l’État demande aux communes de signer des contrats de mixité sociale pour définir la stratégie de construction afin d’atteindre 25 % de logements sociaux en 2025, ce qui est irréalisable pour de nombreuses communes !

Dernière trouvaille, la cotation des demandes de logement : ce système informatisé aboutit à attribuer un logement sans étudier l’aspect humain de la demande. Bref, les élus qui ont la responsabilité d’examiner les dossiers au sein des commissions d’attribution des logements (CAL) sont remplacés par l’ordinateur… voilà une grande avancée dans l’absurde technocratique !

 De plus, la construction des opérations de logements sociaux doit respecter des ratios de catégories de logements pour bénéficier des financements de l’État. Enfin, on ne saurait oublier les menaces d’un ministre pétri d’idéologie proférées à l’égard de ces maires qui se refusent à obtempérer aux ukases du gouvernement !
         
5) Sécurité publique
  
Recul permanent de l’État, mainmise sur les   polices municipales. Le recul de l’État en matière de sécurité n’est pas   nouveau. Depuis des années, les communes ont pallié le recul de l’État   régalien en matière de sécurité. Les promesses n’engagent que ceux qui les   reçoivent, on le sait ; mais la proposition de loi (PPL) relative à la   sécurité globale adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture   franchit un seuil important :
  
L’article 1er de cette PPL   d’un député LREM dispose, à ce stade à titre d’expérimentation : «   …les communes […] employant au moins vingt agents de police   municipale ou gardes champêtres, dont au moins un directeur de police   municipale ou un chef de service de police municipale, peuvent demander à ce   que leurs agents de police municipale exercent les compétences de police   judiciaire. »
  
« Les agents de police municipale adressent   sans délai leurs rapports et procès-verbaux au maire et par l’intermédiaire   des directeurs de police municipale ou chefs de service […] au procureur de la   République. »
  
Tout cela est d’une simplicité biblique. Les   officiers de police judiciaire sont de moins en moins nombreux au sein de la   police nationale. En conférant des pouvoirs d’OPJ aux agents municipaux qui   doivent rendre compte aux procureurs, l’État nationalise indirectement les   polices municipales, tout en laissant leur coût aux communes… C’est du grand   art !
         
Cette réalité décrite ci-dessus – au   demeurant très simplifiée – et très incomplète est dramatique, elle a une   double conséquence :
  
Sur le plan politique, les communes,   fondement de notre identité et de la démocratie de proximité, sont en danger   de mort. L’action du maire est totalement encadrée par la technocratie, il   devient une potiche alors que, pour les Français, il est le premier guichet   des autorités et de « l’administration ». Rabaisser les compétences du   maire est une faute politique lourde !
  
Sur le plan économique, la baisse drastique   des ressources des collectivités territoriales va entraîner une baisse tout   autant drastique de leurs investissements ; investissements qui   représentaient, il y quelques années, 72 % des investissements publics,   aujourd’hui tombés à 56 %. C’est une faute majeure en matière économique,   sans mentionner la nécessité de répondre aux besoins de proximité de nos   concitoyens : crèches, écoles, équipements sportifs et culturels, voirie,   sécurité…

Prends garde Jupiter :
« Quand le peuple est plus éclairé que le trône, il est bien près d’une révolution ».
Antoine de Rivarol
       
       
       

                                                            *Jacques MYARD MAIRE DE MAISONS-LAFFITTE MEMBRE HONORAIRE DU PARLEMENT
PRÉSIDENT DE l’ACADÉMIE DU   GAULLISME ET DU CNR.
       

© 01.03.2021

Retourner au contenu