À la recherche de la République P. Kloboukoff - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
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A la recherche de  la République et de ses valeurs perdues
         
       
  
       
         En résumé
         
En   hiver comme en été « la République » et ses « valeurs »,   Liberté, Egalité, Fraternité, fleurissent à tout bout de champ dans la bouche   de nos politiciens. Ainsi, dans les deux premières pages du discours du   Président de la République d’octobre 2020 sur le thème de la lutte contre les   séparatismes, le mot « République » est prononcé 17 fois et le mot   « républicain » l’est 3 fois. Comme la Marseillaise, ces mots   « magiques » se réfèrent toujours à la Révolution de 1789 et à la   Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen dans l’imaginaire collectif.   Ceci, malgré la quinzaine de versions successives de la Constitution qui ont   jalonné nos cinq Républiques depuis 1791. Aujourd’hui, la 5ème est   « la République ». Mais au plan institutionnel comme dans la   réalité, la 5ème République de 2020 et ses   « valeurs » sont très différentes de celles de 1958.
  
En   1905, la loi de Séparation de l’Eglise et de l’Etat, avait ouvert grand les   portes à la laïcité et apporté des restrictions à la liberté d’expression et   de manifestation de la religion, catholique, en particulier. Maintenant, la   laïcité est confrontée à « l’islamisme radical » et la   République aux séparatismes.
       
 
En 1905, la loi de Séparation de l’Eglise et de l’Etat, avait ouvert grand les portes à la laïcité et apporté des restrictions à la liberté d’expression et de manifestation de la religion, catholique, en particulier. Maintenant, la laïcité est confrontée à « l’islamisme radical » et la République aux séparatismes.
 
Au lendemain de la 2ème guerre mondiale, en octobre 1946, la Constitution de la 4ème République a instauré un régime parlementaire. Elle a réaffirmé les droits déclarés en 1789 et a ajouté une quinzaine de principes et de droits, dont : l’égalité femmes - hommes, le droit d’asile, les bases de notre Sécurité Sociale…
 
La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de décembre 1948, inspirée de la déclaration de 1789, en a beaucoup élargi le spectre et développé le contenu. Très marquée par la barbarie et les atrocités de la guerre, elle a proclamé la reconnaissance de la dignité de tous les êtres humains. Elle est devenue une référence pour de nombreux pays membres de l’ONU, dont la France.
 
Pendant la guerre d’Algérie, sous l’impulsion du Général De Gaulle, la 5ème République a été instaurée en octobre 1958, avec une Constitution taillée sur mesure pour lui, futur président. Le régime est devenu nettement plus présidentiel que parlementaire. Par la suite, avec les changements apportés au début des années 2000 et le passage du septennat au quinquennat, les pouvoirs du président, chef de l’exécutif, ont été notablement accrus. Le Parlement a perdu presque toute faculté d’initiative et capacité d’amendement ou d’opposition, surtout depuis juin 2017. L’Etat, plus centralisateur, a réduit les ressources et les prérogatives des régions et des autres collectivités locales. Il leur préfère ses préfets, notamment dans l’application des mesures de lutte contre le coronavirus.
 
L’adhésion de la France à l’Union européenne (UE), a provoqué de très importants changements. Les transferts de compétences à l’UE, l’irrespect par celle-ci du principe de subsidiarité et la soumission de notre législation à   ses exigences ainsi qu’à celles d’innombrables traités ont considérablement   réduit l’indépendance et la souveraineté nationale de la France. De Giscard   D’Estaing à Macron, chacun de nos présidents, « garant de   l’indépendance nationale » a œuvré dans « le sens de   l’Histoire ». Le dernier, européiste et multilatéraliste déclaré est le   plus actif dans la promotion de l’intégration européenne et l’opposition au   nationalisme et au patriotisme… populistes.
 
L’intégration à l’UE a nécessité 6 révisions de la Constitution française depuis 1992, qui ont eu pour objets principaux ses mises en conformité avec le traité de Maastricht en 1992, les accords de Schengen en 1993, le traité d’Amsterdam en 1999, le traité établissant une Constitution pour l’Europe en 2005 et le traité de Lisbonne en 2008.
 
Malgré cela, notre Constitution est très peu loquace sur l’appartenance de la France à l’UE. En quelques mots, elle renvoie aux traités signés, et plus spécialement au traité de Lisbonne. Il faut donc les disséquer pour avoir une vue complète du contenu et des implications de notre Constitution. Et rien sur l’UEM et l’euro. Chapeau !
 
L’UE s’est aussi dotée d’une Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Elle est devenue contraignante pour l’Union dès le lendemain avec la signature du traité de Lisbonne. Les droits y sont nombreux. Les devoirs, moins. Les principes et les valeurs, ainsi que leur hiérarchie diffèrent un peu de ceux de la France.
 
La Charte de l’environnement de 2004 a introduit les principes de prévention, de précaution et pollueur-payeur. Elle a placé la préservation de l’environnement et la recherche du développement durable au même rang que les autres intérêts fondamentaux de la Nation, et a formulé de sages recommandations. Mais, si la Charte a une valeur constitutionnelle, elle n’a pas institué de droits ou de libertés que la Constitution garantit.
 
11 ans plus tard, l’Accord de Paris sur le climat (COP21) adopté sous l’égide de l’ONU était « contraignant ». Il visait à limiter le réchauffement de la planète à un niveau inférieur à 2° C, puis à le limiter à 1,5% « sur le long terme ».
 
Pour répondre à l’urgence, la loi énergie et climat votée en 2019 avait fixé à 2050 l’objectif de neutralité carbone, qui nécessiterait la division de l’émission de gaz à effet de serre au moins par 6. Mettre le turbo est devenu vraiment urgent ! Une des 149 propositions présentées en juin 2020 par la Convention citoyenne pour le climat, mobilisée à cet effet, visait à « introduire les notions de biodiversité, d’environnement, de lutte contre le réchauffement climatique » dans l’article 1 de la Constitution. Un référendum devrait en décider, probablement pas avant 2022. Mais pas question, pour le Président, de « placer l’environnement au dessus de nos autres valeurs fondamentales ».
 
En attendant, un épais « Projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets » est à l’examen et suscite de vives critiques. Des associations écologistes dénoncent même « un sabotage en règle des mesures des citoyens et citoyennes ».
Sur fond de lutte contre le coronavirus, de confinements, de couvre-feux et des péripéties de la vaccination, avant que les Autorités se consacrent plus et mieux à la « relance économique et sociale, la défense de l’environnement et du climat, préoccupation majeure des Français, est en train de devenir une priorité.
 
Nous sommes très loin des problèmes et des contingences de 1789, et même de 1958… bien que nous soyons encore en 5ème République. Avec une Constitution que l’on a triturée, torturée, afin qu’elle puisse tout accepter, et dont les paroles ne sont plus en accord avec la Marseillaise et la représentation de la République que l’on donne.
 
Pouce ! Une pause s’impose avant de continuer à empiler de nouvelles lois, dont celle sur la bioéthique et la PMA, génératrice de profondes divisions, ainsi que celle, liberticide et répressive, sur la Sécurité globale, et d’altérer davantage la Constitution. Mieux vaudrait faire un point d’ensemble et regarder à nouveau, posément, quelles sont les priorités ainsi que les principes fondamentaux et les valeurs propres à la nation qui doivent prévaloir et servir à mettre à jour le cadre institutionnel et juridique de la France de façon aussi pérenne que possible.
 
Ceci, d’autant plus que le respect de nos valeurs connait de graves entorses et que les significations des mots les définissant ont évolué, ou dérivé, tendant à les rendre méconnaissables. Ainsi, notamment : - la Liberté n’est plus subordonnée à la souveraineté de la nation, la sureté n’est pas assurée sur tout le territoire, la moitié du Revenu national est confisquée par le fisc et dépensée par des Administrations tentaculaires… ; - l’Egalité a cédé la place à l’égalitarisme, aux réductions de toutes les inégalités, devenues des luttes contre les différences, et au nivellement par le bas… ; - la Fraternité, à connotation familiale et religieuse, est passée à la trappe, remplacée par la Solidarité, une valeur qui se confond avec la lutte contre les inégalités et engendre une redistribution géante financée par les plus « riches », sans réduire la pauvreté… ; - la Laïcité ne réussit pas à décourager les tentatives « séparatistes ».
 
Les Gaullistes qui ont rédigé la Constitution de 1958 ne rêvaient sans doute pas de tels progrès. Et notre palette de valeurs mériterait au moins d’être complétée par l’Exemplarité, comme l’a portée le Général.
 
Aujourd’hui, il y a aussi et surtout un besoin pressant de Démocratie, de Décentralisation et de Participation. De la Stabilité et de la Sérénité ne seraient pas du luxe.
 
Pourquoi ne pas y songer avant la prochaine échéance présidentielle ?
 
Pourquoi cet usage immodéré de la République et de ses valeurs ?
 
Trop de politiciens qui cherchent à noyer le poisson, qui n’ont pas grand-chose de construit, de solidement argumenté, de convainquant à « communiquer » cèdent à la tentation et/ou la facilité de convoquer, d’évoquer, d’invoquer la « République » et ses « valeurs », voire d’en abuser.
A cet égard, le discours du Président du 2 octobre 2020 sur le thème de la lutte contre les séparatismes (1) est une pièce de collection. Sur la dizaine de pages du texte, les deux premières comptent 17 fois le mot « République » et 3 fois le qualificatif « républicain ». Les références aux « valeurs de la République » et aux « lois de la République », sont omniprésentes. Nous trouvons aussi des « citoyens de la République », des « élus, des préfets de la « République ». L’islamisme radical est visé, avec ses « ennemis de la République ». Parmi eux, les 170 jeunes radicalisés partis faire le Jihad en Syrie sont « souvent » des « enfants de la République ». Pauvre mère !
 
La « République française » et la « France » sont incontournables à propos de la laïcité, puisque c’est une « valeur » spécifique de notre pays. Mais il est Inutile de chercher l’évocation de la « nation » ou de la « patrie » dans ces deux pages. Elles n’ont pas leur place dans la profession de foi d’un président européiste intégriste, ennemi déclaré du nationalisme et du patriotisme. « France » ou « français » ne peuvent être prononcés que du bout des lèvres. La République est plus aisément accommodable que la Nation à toutes sauces multi nationalistes et/ou mondialistes.
 
Au fait, de quelle République et de quelles valeurs s’agit-il ?
 
La république s’est universalisée
 
En 1791, la république était un régime original. En 2021, la république est la forme de régime politique de loin la plus répandue sur la planète. Parmi les 197 pays, 151 sont officiellement des républiques. Mais ce n’est pas la République, née de la Révolution française qui a fait tache d’huile. En 1914, parmi la vingtaine de ses Etats, l’Europe ne comptait que trois républiques, la France, la Suisse et le Portugal (2).
 
Dans l’Union européenne (UE) à 27, après le départ du Royaume Uni (RU), se trouvent encore 5 Royaumes, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, les Pays-Bas et la Suède, ainsi que le Grand-duché du Luxembourg. Avec le RU, il y avait autant de monarchies que de Républiques dans la « Vieille Europe » jusqu’en 1992. C’est aux élargissements à de nombreux pays de l’Est que l’on doit aujourd’hui la nette prédominance de la « république » au sein de l’UE.
 
Mais, rassurons-nous, tous ces Etats de l’UE, monarchies ou républiques, ont affirmé leur attachement aux Droits de l’homme et sont considérés comme des démocraties. Ce sont des régimes parlementaires. Ils ne sont pas dirigés par le chef d’Etat, qu’il (ou elle) soit monarque ou président, mais par un chef de gouvernement désigné par le Parlement. La France fait figure d’exception avec un président omnipotent, chef des armées de surcroît, qui décide de tout. La situation a été aggravée avec le passage au quinquennat et a empiré depuis mai 2017. A l’approche des élections de 2022, à l’été 2020, le président a choisi un nouveau Premier ministre dévoué qui ne risque pas de lui faire de l’ombre. Pour le plus grand bien de la France et de ses citoyens, bien sur ! C’est le côté bonapartiste revisité de nôtre République. Grandeur et décadence ! Domination et repentance !
 
Des principes clairs dans la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789
 
Avec son ouvrage « Du Contrat social » (1762), Jean-Jacques Rousseau a été le principal inspirateur de la première Constitution française du 3 septembre 1791, ainsi que de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen reconnue et déclarée, « en présence et sous les auspices de l’Etre suprême » le 26 août 1789. Pour lui, « Si l’on recherche en quoi consiste précisément le plus grand bien de tous, qui doit être la fin de tout système de législation, on trouvera qu’il se réduit à deux objets principaux, la liberté et l’égalité ». Il subordonnait la liberté à l’égalité politique et à la souveraineté de la nation (3).
 
«  Liberté, égalité, fraternité ! ». Comprenant 17 articles, la Déclaration est compacte (4). Elle commence par « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits… »
         
(Art1). L’article 2 précise : « … Ces   droits sont la liberté, la propriété, la sureté, et la résistance à   l’oppression ». L’article 3 énonce : « Le principe   de toute Souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul   individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément ».   En écrivant à l’article 6, « La loi est l’expression de la volonté   générale… », L’Assemblée constituante n’imaginait pas que les lois   pourraient être édictées par le pouvoir exécutif et validées à l’Assemblée   nationale par une « majorité présidentielle » ayant été élue avec   seulement 20% des voix des électeurs inscrits sur les listes électorales…   comme c’est le cas depuis juin 2017. Elle ne pouvait soupçonner que des   engagements figurant dans des traités internationaux primeraient sur nos   propres lois. Elle ne se retrouverait sans doute pas chez elle aujourd’hui.
       
 
« Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi », disait l’Article 10.
 
De la Séparation de l’Eglise et de l’Etat en 1905 à la lutte contre les séparatismes en 2020
 
La loi du 9 décembre 1905 sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat a apporté des restrictions à ce dernier article 10 et ouvert grand la porte à la laïcité. Puis, surtout pendant les quarante dernières années, la tendance anticléricale a pris de la vigueur et le catholicisme s’est recroquevillé dans sa coquille. Ces dernières années, la laïcité s’est trouvée confrontée à « l’islamisme radical » et à la petite minorité des musulmans [pas d’amalgames !] qui place les lois de l’Islam au-dessus de celles de la République et de ses valeurs, qui refuse de s’intégrer et de partager « le vivre ensemble » républicain. Et c’est à la résolution de ces maux que le projet de loi de lutte contre les séparatismes est censé s’attaquer… notamment en modifiant la sacro-sainte (jusque-là) loi de 1905. Face aux polémiques et au procès d’intentions que le projet a soulevés, l’exécutif a décidé de changer l’appellation de la loi. Le 9 décembre 2020, le Premier ministre a présenté le « projet de loi confortant les principes républicains » (5). Il ne suffirait donc pas de faire respecter les principes et les lois de la République. Il faut encore des lois pour faire évoluer ces principes directeurs, des lois qui comportent inévitablement des atteintes à des libertés… que l’article 10 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ne prévoyait pas. Mais, pas de soucis, en France il est plus important de produire de nouvelles lois pour contourner des problèmes que de faire respecter celles qui existent.
 
La Constitution de 1946 a complété et étoffé les Droits de l’Homme de 1789
 
Au lendemain de la guerre, le peuple français a approuvé par référendum le 13 octobre 1946 le projet de la Constitution de la 4ème République qui a été promulguée le 27 octobre 1946. Son préambule réaffirmait les droits et libertés consacrés par la Déclaration du 26 août 1789. Il y ajoutait une quinzaine de principes et de droits, parmi lesquels : - l’égalité, dans tous les domaines des droits des femmes avec ceux des hommes ; - le droit d’asile aux persécutés ; - le droit au travail, sans discriminations : - la reconnaissance de l’action syndicale ; - le droit de grève ; - la garantie pour l’individu et sa famille des conditions nécessaires à leur développement ; - des protections sanitaires et sociales (à la base de notre Sécurité Sociale) ; - l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture, avec un enseignement laïque et gratuit à tous les degrés (6).
 
La 4ème République a instauré un régime parlementaire comportant des mécanismes de contrôle réciproque entre les corps exécutifs et législatifs. L’Assemblée nationale y détenait le monopole de l’expression de la souveraineté nationale, ne pouvait déléguer le pouvoir de légiférer, et les conditions de sa dissolution étaient précisées.
La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 est devenue « la référence »
 
La France n’a pas renié la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, mais a fait partie des 58 Etats Membres de l’Assemblée générale de l’ONU qui ont adopté la Déclaration universelle des droits de l’homme le 10 décembre 1948 (7). Très marqués par la guerre, les actes de barbarie et les atrocités commises, les rédactrices et les rédacteurs ont été attachés à la reconnaissance de la dignité de tous les êtres humains, contre la torture, l’esclavage, les traitements dégradants et humiliants, ainsi qu’à la sauvegarde de la paix. Aussi, allant au-delà de la Déclaration de 1789, l’article 1 stipule : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité ».
 
Ses 30 articles (comportant 49 alinéas) portent sur les droits des individus, sur leurs devoirs, ainsi que sur des obligations des Etats. Détaillés, ils entrent plus en profondeur dans la vie des personnes et des familles, traitant des droits aux déplacements, au travail, à l’éducation, à un niveau de vie décent… Aux Etats, ils imposent des élections périodiques au suffrage universel et à bulletins secrets.
 
Cette Déclaration a servi de référence dans l’élaboration des Constitutions de nombreux pays Membres de l’ONU. Pour autant, ses principes ne sont pas respectés partout… même par des pays membres du Conseil de Sécurité.
 
Depuis 2007, une Charte des droits fondamentaux de l’UE contraignante
 
Sur le chemin de l’intégration, l’UE s’est dotée d’une « Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne », assez largement inspirée par la Déclaration universelle des droits de l’homme. Dans sa version « définitive » (8), adoptée le 12 décembre 2007, elle est devenue contraignante pour l’Union dès le lendemain avec la signature du traité de Lisbonne qui a transformé l’architecture institutionnelle de l’UE. Ce traité avait été rejeté par référendum, rappelons-le, le 29 mai 2005 en France et le 1er juin 2005 aux Pays-Bas.
 
Le préambule de la Charte déclare que « l’Union se fonde sur les valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de liberté, d’égalité et de solidarité ; elle repose sur le principe de la démocratie et le principe de l’Etat de droit. Elle place la personne au cœur de son action en instituant la citoyenneté de l’Union et en créant le principe de liberté, de sécurité et de justice ».
 
Dans cette Charte, très peu connue des Français, les droits sont répartis en droits civils, comprenant les droits de l’homme et ceux de la procédure juridique, les droits politiques spécifiques associés à la citoyenneté européenne, et les droits économiques et sociaux.
 
Les 53 articles de la Charte, de portées très inégales, sont classés en 6 chapitres : - Dignité : dignité humaine, droit à la vie, droit à l’intégrité de la personne, interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants… ; - Liberté : droits à la liberté et à la sureté, respect de la vie privée et familiale, protection des données à caractère personnel, liberté de pensée, de conscience et de religion, liberté d’expression et d’information, droit à l’éducation, liberté professionnelle et droit de travailler, liberté d’entreprise, droit d’asile, protection en cas d’éloignement, d’expulsion et d’extradition… ; - Egalité : Egalité en droit, non-discrimination, diversité culturelle, religieuse et linguistique, égalité entre hommes et femmes, droits de l’enfant, des personnes âgées et des handicapés ; - Solidarité : droits des travailleurs au sein de l’entreprise, droit de négociation et d’actions collectives, conditions du travail, protection des travailleurs, vie familiale et vie professionnelle, sécurité sociale et aide sociale, protection de la santé, accès aux services d’intérêt économique général, protection de l’environnementUn niveau élevé de protection de l’environnement et l’amélioration de la qualité doivent être intégrés dans les politiques de l’Union et assurés conformément au principe du développement durable ») , protection des consommateurs ; -
         
Citoyenneté : droits de vote et d’éligibilité au Parlement européen et   aux élections municipales, liberté de circulation et de séjour, protection   diplomatique et consulaire… ; - Justice : Droit à un   recours effectif à accéder à un tribunal impartial, présomption d’innocence   et droits de la défense, principe de légalité et de proportionnalité des   délits et des peines, droit à ne pas être jugé ou puni pénalement deux fois   pour une même infraction ; -Dispositions générales régissant   l’interprétation et l’application de la Charte.
       
 
Les valeurs et les principes portés par cette Charte ont influencé ceux des pays de l’Union ainsi que leurs législations, que les « directives de Bruxelles » ont aussi contribué à élaborer. Pour sa part, le Premier ministre Castex, les a bien assimilés, puisque dans sa présentation du projet de loi confortant les principes républicains (5) : « Ces principes, c’est notamment le respect de la dignité humaine, celui de la liberté d’expression, de penser, de prier, l’égalité entre tous, et particulièrement entre les femmes et les hommes, les droits de l’enfant, notamment, à l’éducation, et plus généralement le refus des comportements dégradants ». Il est bien placé pour en faire la promotion.
 
Du parlementarisme à un régime présidentiel avec la Constitution de 1958
 
De profonds changements ont été apportés par les Gaullistes au régime politique et au mode de gouvernance de la France le 4 octobre 1958 avec l’institution de la 5ème République et une Constitution taillée sur mesure. Selon De Gaulle en 1958, le président a le pouvoir institutionnel et (s’agissant de lui-même) l’autorité personnelle qui sont indispensables pour régler « les trois affaires qui dominent notre situation : l’Algérie, l’équilibre financier et la réforme de l’Etat ». Le 11 avril 1961, il avait expliqué : « Notre Constitution est à la fois parlementaire et présidentielle, à la mesure de ce que nous commandent à la fois les besoins de notre équilibre et les traits de notre caractère ». En fait le régime était plus présidentiel que parlementaire en 1958, et il l’est devenu davantage à partir de 1962 avec l’élection du président au suffrage universel direct. De Gaulle en avait alors dit le 20 septembre 1962 : « Un des caractères essentiels de la Constitution de la Ve République, c’est qu’elle donne une tête à l’Etat » (9).
 
Pour lui, le pouvoir institutionnel et l’autorité du chef de l’Etat étaient quasiment des valeurs de la République. Au contraire, dans le coup d’Etat permanent (1964), pour François Mitterrand, « Qu’est-ce que la Ve République, sinon la possession du pouvoir par un seul homme… », ou encore, « J’appelle le régime gaulliste dictature parce que, tout compte fait, c’est à cela qu’elle ressemble le plus ». Il s’en est cependant accommodé avec délectation.
 
En fait, un régime qui avait été établi en fonction de circonstances particulières, « exceptionnelles », de la décolonisation, de la guerre d’Algérie et des troubles en métropole, ainsi que de la personnalité du futur président, De Gaulle, est devenu un régime permanent qui a plus de 60 ans aujourd’hui.
 
Mais, les réformes de 2000 à 2002 qui ont amené le quinquennat et « adapté » le calendrier des législatives, ont défiguré le régime. Elles ont accru le pouvoir institutionnel du chef de l’Etat et de son parti et réduit à presque néant toute possibilité d’opposition parlementaire. A défaut d’avoir le prestige du Général, pour affirmer leur autorité, Nicolas Sarkozy et François Hollande en ont copieusement usé. Avec Emmanuel Macron, alias « Jupiter », il semble ne plus y avoir de limites à la centralisation et à la concentration des pouvoirs ainsi que des décisions, jusque dans la « stratégie » et la « gestion » de la crise sanitaire du coronavirus. Au nom de la protection de la santé des Français, avec les prorogations de l’état d’urgence sanitaire se pérennise un régime d’exception porteur de privations de libertés et d’autres graves dégâts collatéraux.
 
De la Constitution du 4 octobre 1958 à celle en vigueur aujourd’hui
 
         
Dans la version originelle de la Constitution, le préambule édicte : « Le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l’homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu’ils ont été définis par la Déclaration des droits de l’homme de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946 ». L’article 3 stipule que « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants ou par la voie du référendum ». L’article 5 précise que « Le Président de la République veille au respect de la Constitution. Il assure par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’Etat. Il est garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire, des accords de Communauté [de la République et des Territoires d’Outre-Mer] et des traités » (10). 14 autres articles du Titre II parmi les 92 articles de la Constitution sont consacrés au Président, soulignant l’importance de la fonction et traitant de ses différents aspects.
 
Depuis la Révolution, le texte fondamental en est à sa 15ème version, la dernière modification ayant eu lieu avec la loi constitutionnelle du 27 juillet 2008, liée à la signature du traité de Lisbonne. Dans la version de la Constitution en vigueur aujourd’hui (à la date du 1er juillet 2019) (11), à côté des similitudes avec la version originelle, il y a des nouveautés, ainsi que d’apparentes contradictions ou incohérences. Ces dernières proviennent notamment de l’adhésion de la France à l’UE et à ses principes fondamentaux, puis à l’Union Economique et monétaire (UEM) avec le partage d’une monnaie commune, l’euro [dont je n’ai pas trouvé trace dans la Constitution, question subalterne ou « éludée », sans doute] ainsi que de l’acceptation des transferts de compétences et des obligations qui en ont résulté. La signature d’un nombre inavoué de traités, directement ou via l’UE, qui prévalent plus ou moins sur notre législation ou la dictent, ne facilite pas la compréhension de notre Constitution et de sa portée réelle.
 
L’article préambule de la Constitution commence avec les mêmes termes que celui de 1958, à ceci près que le peuple français y proclame solennellement aussi son attachement « aux droits et devoirs définis dans la Charte de l’environnement de 2004 »… à laquelle il renvoie. Par l’adoption de cette Charte « adossée à la Constitution », le but était « d’inscrire une écologie humaniste au cœur de notre pacte républicain »,
 
L’article 1 apporte cette nouvelle définition : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée » … [Mais pas les pouvoirs et la gouvernance]. « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales » … [En quoi favorise-t-elle les hommes ?].
 
A propos De la souveraineté, le texte répète que : - la langue de la République est le français [ce qui est loin d’être inutile], l’emblème national est le drapeau tricolore [sans parler du drapeau étoilé de l’UE, qui avoisine souvent notre drapeau tricolore], l’hymne national est « La Marseillaise », la devise de la République est « Liberté, Egalité, Fraternité » ; - son principe est « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». C’est un principe souvent répété, qui n’est pas qualifié de « populiste » et qui est ouvert à de nombreuses interprétations.
 
Au Titre XV - De l’Union européenne, l’article 88-1 rappelle que « La République participe à l’Union européenne constituée d’Etats qui ont choisi librement d’exercer en commun certaines de leurs compétences en vertu du traité sur l’Union européenne et du traité sur le fonctionnement européen, tels qu’ils résultent du traité signé à Lisbonne le 13 décembre 2007 ». C’est une façon à peine voilée de dire que lesdits traités sont « associés » à notre Constitution, et qu’il appartient à ceux qui veulent en savoir plus d’aller les explorer.
En même temps, cela permet de ne pas exposer à la vue l’étendue et les domaines principaux de dépendance de la France envers l’UE et ses autres « partenaires ».
 
Assez abstraits et sibyllins, les articles 88-2 à 88-7 traitent surtout de questions de procédures concernant le cheminement, l’adoption et la contestation d’actes législatifs européens, notamment sur le respect du principe de subsidiarité. Ils sont visiblement destinés à des spécialistes.
 
Cela paraît un peu maigre si l’on considère que l’intégration à l’UE a nécessité pas moins de 6 révisions de la Constitution française depuis 1992, qui ont eu pour objets principaux ses mises en conformité avec les traités, jusqu’à celui de Lisbonne en 2008… en attendant les suivantes.
 
De la Charte de l’environnement de 2004
 
La Charte introduit trois grands principes, ceux de prévention, de précaution et pollueur-payeur. Dix articles précisent les droits et libertés définis dans la Charte. Ils sont précédés de sept alinéas qui disposent :
 
« Que les ressources et les équilibres naturels ont conditionné l’émergence de l’humanité ;
 
Que l’avenir et l’existence même de l’humanité sont indissociables de son milieu naturel ;
 
Que l’environnement est le patrimoine commun des êtres humains ;
 
Que l’homme exerce une influence croissante sur les conditions de la vie et sur sa propre évolution ;
 
Que la diversité biologique, l’épanouissement de la personne et le progrès des sociétés humaines sont affectés par certains modes de consommation ou de production et par l’exploitation excessive des ressources naturelles ;
 
Que la préservation de l’environnement doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la Nation ;
 
Qu’afin d’assurer un développement durable, les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne doivent pas compromettre la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire à leurs propres besoins ».
 
Même s’ils ont une valeur constitutionnelle, aucun de ces alinéas, pas plus qu’un article de la Charte, n’institue un droit ou une liberté que la Constitution garantit (12). Ils ne peuvent donc être invoqués dans le but de sanctionner uniquement la méconnaissance de droits et libertés garantis par la Constitution. Et c’est un des points où le bât blesse, un « défaut » majeur auquel la Convention citoyenne pour le climat voudrait remédier.
 
Parmi les 10 articles, le 1er stipule que « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré », et le 2ème, que « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement ». A l’article 4 : « Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement, dans les conditions définies par la loi ». A l’article 6, « Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social ». A l’article 10 « La présente Charte inspire l’action européenne et internationale de la France » (13).
 
Vers un référendum pour introduire la défense du climat dans la Constitution
 
L’Accord de Paris sur le climat visait à : - limiter le réchauffement de la planète à 2%, puis à 1,5% « sur le long terme » ; - renforcer les capacités des pays à faire face aux conséquences du réchauffement climatique.
 
La France s’était déjà engagée et a poursuivi sur la voie indiquée, mais avec une conviction et un rythme jugés insuffisants. La loi énergie et climat de 2019 avait fixé à 2050 l’objectif de neutralité carbone, qui nécessiterait la division de l’émission de gaz à effet de serre au moins par 6. La Convention citoyenne pour le climat a été constituée et mobilisée pour accélérer le mouvement.
L’une des 149 propositions présentées en juin par ses 150   membres visait à « introduire les notions de biodiversité,   d’environnement, de lutte contre le réchauffement climatique » dans   l’article 1 de la Constitution.
 
Le président a indiqué le 14 décembre qu’un référendum serait organisé pour intégrer la défense du climat et la préservation de l’environnement dans la Constitution. Mais, il avait déjà refusé de modifier son préambule et de « placer l’environnement au-dessus de nos autres valeurs fondamentales » (14). Seul l’article 1 serait modifié.
 
Si l’Assemblée nationale et le Sénat parviennent à s’entendre sur un texte commun, les citoyens seront donc consultés par référendum pour intégrer la protection de l’environnement dans l’article 1 de la Constitution. Compte-tenu de la procédure à suivre et de la charge du calendrier parlementaire, notamment, il semble peu probable que ce référendum soit organisé avant les élections de 2022.
 
Avec un nouveau projet de loi climat polémique en cours d’examen
 
Les propositions de la Convention citoyenne ont aussi servi au ministère de la Transition écologique pour l’élaboration du « Projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets » (15). Après un exposé des motifs volontariste de plusieurs pages, ses 63 articles sont distribués en cinq Titres dénommés : Consommer, Produire et travailler, Se déplacer, Se loger, Se nourrir. En leitmotivs, on retrouve les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et/ou de l’empreinte carbone dans les activités urbaines et rurales, dans les transports routiers et aériens [pas fluviaux et maritimes !]. Sont « recommandés » aussi des changements à apporter aux modes de vie et à l’organisation des villes.
 
Il manque l’article sur la création d’un délit d’écocide, annoncé en grande pompe en décembre par les ministres Eric Moretti et Barbara Pompili.
 
Dès le 9 janvier, « Reporterre, le quotidien de l’écologie », a titré : « Le projet de loi réduit à néant les propositions de la Convention citoyenne sur le climat » (16). Il a rapporté que des associations écologiques dénonçaient « un sabotage en règle des mesures des citoyens et des citoyennes ». L’objectif de réduction de moins de 40% des émissions de gaz a effet de serre a été très critiqué. Parmi d’autres réactions : - « Quel immense écart entre les mots forts de l’exposé des motifs… et la réalité de ce que contiennent les articles concernés » ; - « Les propositions les plus structurantes ont été édulcorées, détricotées, voire oubliées » ; - « L’écriture du texte est assez malhonnête. La loi est truffée d’imprécisions et d’exceptions. Beaucoup d’éléments sont renvoyés à des décrets ».
 
J’ai aussi retenu cette observation : - « La vision du gouvernement en matière d’écologie transparait : une focalisation sur les écogestes, l’information des consommateurs et l’engagement volontaire des entreprises ».
 
On peut donc s’attendre à des débats animés lorsque le texte sera soumis à l’Assemblée nationale, ainsi qu’à une flopée de propositions d’amendements… qui ne reflèteront pas une opposition maladive à la politique jupitérienne.
 
Des valeurs de la République à la dérive
 
Au fil des dernières décennies, les valeurs de la République se sont éloignée des fondamentaux initiaux de la 5ème République. Les orientations et l’ampleur des dérives devraient inciter à s’interroger sur le chemin suivi par la France et à faire un point approfondi sur notre « modèle » plutôt que d’enchaîner des « réformes » et de multiples lois au gré des évènements, des modes et des visées électorales. Un cadrage d’ensemble manque cruellement.
 Liberté : Pour Jean-Jacques Rousseau la liberté était subordonnée à la souveraineté de la nation. Or, la France est dépendante de l’UE et de l’UEM, de la Banque centrale européenne, auxquelles « on a confié les clés du camion ».
La liberté c’est d’abord le droit à la sureté. Or, dans des « zones de non droit », il est dangereux de s’aventurer, et dans d’autres lieux fréquentés, la sécurité n’est pas assurée. Cela ne peut justifier des contrôles d’identité au faciès. Or, l’Etat est mis en demeure par six associations, dont Amnesty International et Human Rights Watch, de modifier le code de procédure pénale pour mettre fin aux « contrôles d’identité discriminatoires » par la police (17).
 
Le surendettement public, comme celui de nombreux ménages et d’entrepreneurs, n’est pas un gage de liberté.
 
La moitié du Revenu national est confisquée par le Fisc et des « Administrations publiques » pour dépenser et pour redistribuer selon le bon vouloir d’un exécutif aux pleins pouvoirs ; - ce même exécutif peut à sa guise confiner les populations, décider de couvre-feux, décréter un état d’urgence sanitaire et prolonger cet « état d’exception » pendant de longs mois, privant de libertés et de revenus des millions de personnes et d’entreprises ; - la promotion du « politiquement correct » limite la liberté d’expression ; - des quotas restreignent la liberté de choix des électeurs et les possibilités pour une partie des candidats potentiels de se présenter à des scrutins…
 
Egalité : Depuis quatre décennies, la France a résolument opté pour l’égalitarisme, cette doctrine qui préconise « l’égalité absolue entre les hommes, une redistribution égale de l’ensemble de la richesse nationale à l’ensemble des individus… une distribution égalitaire des biens ou des ressources ». Nous pouvons observer, comme Luc Ferry que « la course fanatique qui est depuis des lustres une spécialité française n’est paradoxalement pas synonyme de justice » (18). Elle a poussé sans modération les luttes contre les inégalités de toutes sortes, qui sont devenues des luttes contre les différences entre les individus, pour la promotion de l’uniformité.
 
Du primaire aux premiers pas dans le supérieur, le grand principe « tous au même niveau, pas une tête ne dépasse » a amené le nivellement par le bas. « Le Bac pour tous » a conduit à l’abaissement du niveau de l’enseignement et la dévalorisation du diplôme. Dans les études et les premiers emplois, les sélections usant sans assez de discernement de la discrimination positive (ou négative) nuisent à la reconnaissance du mérite et des efforts personnels.
 
Le couvre feu à 18 heures dans toutes les localités et/ou régions, même là où le taux de contamination est faible, est une autre illustration du règne de l’égalitarisme malvoyant, injustement privatif de libertés et d’autres droits.
 
Fraternité : Comme l’UE, nos gouvernants lui ont préféré la Solidarité. Et, chez nous, Solidarité signifie avant tout : fisc et redistribution… avec un critère qui tend à devenir « universel », le niveau du revenu. Un impôt progressif sur le revenu ne suffisait pas. Maintenant la Contribution sociale généralisée (CSG) est déterminée en fonction du revenu du ménage. Pour les retraités, en 2021, son taux va ainsi varier du taux nul, 0%, au taux réduit, 3,8%, au taux médian, 6,6%, jusqu’au taux plein, 8,3%. Les inégalités de traitement, ou discrimination, sont assez considérables. Autre aberration, avec la « réforme de la taxe d’habitation », de 2018 à 2023, le critère de paiement est encore le niveau du revenu du ménage. Tandis que la TH a été supprimée ou réduite par étapes pour 80% des foyers, environ 20% des ménages de « riches » ont continué à la payer plein pot en 2020. Prendre l’argent là où il est, avec le moins possible de risques de vagues est jugé « juste ». Inoffensifs, les retraités, dont on assimile les pensions à des aides sociales, sont des cibles fiscales toutes désignées. Solidarité intergénérationnelle oblige !
 Laïcité : Elle n’a pas le même statut que les trois valeurs précédentes. Peut-être est-ce parce qu’elle est spécifique à la France. D’autres pays d’Europe déclarent avec moins de réserves leur flamme à la liberté de religion… et à la diversité. Et notre laïcité est un concept subtil… qui donne lieu à des interprétations différenciées. Avec son « projet de loi confortant les principes républicains », le gouvernement désire changer les termes de la loi finement ciselée de 1905 qui a si utilement servi depuis 115 ans. Je crains le pire et espère que la raison finira par l’emporter.
Exemplarité : Le mot « exemplaire » est, hélas, le plus souvent utilisé après des évènements graves aux lourdes ou douloureuses conséquences. Une personnalité, un président, un ministre, un procureur… promet alors des sanctions exemplaires aux coupables présumés. Des victimes ou leurs représentants réclament des sanctions exemplaires. Ce n’est pas à ce type d’exemplarité que je me réfère. L’Histoire nous a montré trop de condamnés, de guillotinés et de fusillés « pour l’exemple », de dégâts provoqués par des justices d’exception. Toute décision de justice se doit d’être exemplaire, pouvoir servir de référence, éventuellement de repère en jurisprudence. Même chose s’agissant des décisions prises par des Autorités disposant d’un pouvoir « judiciaire ».
 
L’exemplarité qu’il serait utile de restaurer en France est celle de comportements courageux, loyaux, honnêtes et respectueux des autres. Elle doit venir en premier lieu des personnes les plus en vue, et en particulier des politiciens, surtout de ceux qui, au pouvoir, donnent des leçons aux citoyens. Une suggestion pour faire évoluer les choses : sur le modèle des enquêtes périodiques de popularité, réaliser des enquêtes d’exemplarité et en diffuser les résultats.
 
*Paul KLOBOUKOFF Académie du Gaullisme
                                                                                                                                                                                                                  Le 30 Janvier 2021.
 
Sources et références
(1) La République en actes : discours du Président de la République sur le thème de la lutte contre les séparatismes elysee.fr/emmanuel-macron/2020/10/02/la république…
(2) Etats et nations en Europe (1848-1914) KeepSchool.com/fiches-de-cours/lycee/histoire/etats-nations…
(3) Rousseau : « L’homme est né libre et partout il est dans les fers » histoire-en-citations.fr/citations /rousseau-l-homme… le 12/01/2021
(4) Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 legifrance.gouv.fr/contenu/menu/droit-national…
(5) Présentation du projet de loi confortant les principes républicains gouvernement.fr/partage/11944-presentation… le 09/12/2020
(6) Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 legifrance.gouv.fr/contenu/menu/droit-national…
(7) La déclaration universelle des droits de l’homme un.org/fr/universal-declaration…
(8) La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne touteleurope.eu/actualite/la-charte… le 11/05/2020
(9) De Gaulle : « Notre Constitution est à la fois parlementaire et présidentielle… » histoire-en-citations.fr/citations/de-gaulle…
(10) Sénat - Constitution du 4 octobre 1958 - Texte originel senat.fr/revision/texte_originel.html
(11) Texte intégral de la Constitution du 4 octobre 1958 en vigueur conseil-constitutionnel.fr/le-bloc-de-constitutionnalité…
(12) La Charte de l’environnement conseil-constitutionnel.fr/la-constitution/la-charte…
(13) Charte de l’environnement de 2004 consei-constitutionnel.fr/le-bloc-de constit…
(14) Emmanuel Macron annonce un référendum pour inscrire la défense du climat dans la Constitution ouest-France.fr/environnement/emmanuel… le 14/12/2020
(15) Projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets  Ministère de la Transition écologique 14/01/2021
(16) Le projet de loi réduit à néant les propositions de la Convention citoyenne sur le climat reperterre.net/Le-projet… le 08/01/2021
(17) Contrôles d’identité au faciès : l’Etat visé par une action de groupe orange.fr/france/controles… le 27/01/2021
(18) La France de l’égalitarisme andese.org/chroniques-de-nadia-antonin/460-la France le 18/01/2020

© 01.02.2021

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