Vente de sous-marins nucléaires Jean MENU - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
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Vente de sous-marins nucléaires d’attaque à l’Australie
L’Australie a annoncé mercredi 15 septembre, sa   décision de rompre un gigantesque contrat dûment signé avec la France en 2016   pour la vente de douze sous-marins conventionnels d’attaque Shortfin   Barracuda qui avait été considérée par le ministre australien de l’industrie   de défense, comme le plus gros contrat du monde dans son genre et le   plus important de l’histoire du pays. Il engageait les deux Etats pour les   cinquante prochaines années, le temps de la durée du programme. M Le Drian,   alors ministre de la Défense, s’était rendu à Adelaïde pour inaugurer les   bureaux de Naval Group (ex DCNS) au sein des chantiers navals ACS australien   où devaient être construits ces sous-marins comme l’avait exigé le   gouvernement australien.
Ce programme de défense s’élevait à 34,5 milliards   d’euros, dont 8 milliards pour Naval Group et les industriels français.   Cependant, le côté australien a soupçonné des augmentations de coût du   programme qui pouvait monter jusqu’à 56 milliards d’euros et aussi de subir   des retards.
Canberra, revenant sur son engagement, préfère   désormais construire dans une nouvelle alliance   Australo-Americano-Britannique, dite Aukus, des sous-marins à propulsion   nucléaire en utilisant les technologies américaines et britanniques,   déclenchant ainsi une importante brouille diplomatique entre Paris et ses   alliés.
Un coup dans le dos de la part des Australiens,   comme vient de l’exprimer sans détour et avec raison, le ministre des   affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian.
Le Quai d’Orsay ne ménage pas ses critiques envers   l’administration du président américain Joe Biden qui vient d’infliger un   nouveau camouflet à la France après la vente des chasseurs F35 à la suisse à   laquelle le Rafale était proposé. Les Etats-Unis ayant aussi annoncé un vaste   partenariat de sécurité avec l’Australie et le Royaume-Uni dans la zone   indo-pacifique, n’avait pas pris le soin de consulter la France, malgré son   implication dans la région depuis plusieurs années. Ce pacte Anglo-Saxon   montre d’une part à quel point la présence de la poussière francophone   dérange car elle se permettait d’expérimenter des armes nucléaires dans le   Pacifique et d’autre part que l’influence de l’Europe s’érode.
  
Ce retournement de situation appelle de ma part les   trois remarques suivantes :
  
1-Tout d’abord, j’y vois clairement un lien avec les nouvelles   orientations de l’OTAN affichées récemment, qui visent désormais à travers un   nouveau concept à l’horizon 2030, à bâtir un projet beaucoup plus vaste,   consistant à impliquer l’Alliance atlantique dans la lutte pour l’hégémonie   mondiale qui s’annonce entre la Chine et les États-Unis, risquant ainsi de   nous entrainer dans des conflits qui ne seraient pas les nôtres.
En effet, la montée de la puissance militaire   chinoise est effectivement clairement affichée avec un budget de défense de   180 Milliards Euros et sa présence particulièrement visible dans le pacifique   et en mer de Chine avec le déploiement d’une Marine moderne et puissante, en   deuxième position mondiale derrière celle des Etats Unis qui estiment   nécessaire d’assurer la présence de l’OTAN dans la zone Indo Pacifique et   rechercher une coopération avec l’Inde, l’Australie, le Japon, la   Nouvelle-Zélande et la République de Corée. Il s’agit donc de transformer une   alliance défensive contre un ennemi qui n’existe plus, à savoir l’URSS, tout   en entretenant une supposée menace russe, afin de bâtir une nouvelle   organisation de politique mondiale à vocation planétaire sous domination   américaine.
L’Australie apporte   donc une position stratégique incontournable
       
 Les 12 futurs sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) australiens qui seront totalement en service opérationnel en 2050 porteront des missiles conventionnels de croisière Tomahawk, en mesure de faire peser une menace permanente car ils présentent un avantage considérable par rapport aux autres sous-marins à propulsion électrique et diesel, de pouvoir rester en plongée discrètement avec une allonge   considérable, sans aucune limitation de temps, d’autonomie et de se déplacer   sous l’eau à très grande vitesse. Situation qui bien entendu déplait   profondément à la Chine.
2- Ensuite, la présence de la Grande Bretagne dans ce nouveau programme, me parait présenter   comme un faux pas dans l’accord de défense passé entre nos deux pays le 2   novembre 2010, lors du sommet franco-britannique qui s’est tenu à Londres,   signé par le Premier Ministre britannique David Cameron et le Président   français Nicolas Sarkozy. Dans son volet de coopération industrielle, il   affichait une volonté de renforcer l’industrie de défense des deux pays en   construisant et en exploitant en commun des installations industrielles, de   coopérer et développer leurs bases technologiques pour produire des armements   en partageant les coûts de développement, de soutien et de formation dans les   domaines qui relèvent de la technologie des sous-marins de nouvelle   génération, des missiles, de la guerre contre les mines et des drones.
Malgré le Brexit, la ministre des Armées, Florence Parly, et son homologue   britannique, Ben Wallace, dans une déclaration commune célébrant le 2   novembre 2020, le bilan et l’anniversaire de leur accord de défense,   soulignaient que le traité de Lancaster House, resterait la pierre angulaire   d'une étroite coopération militaire. Ils se sont félicités de ce partenariat   puissant et profond. Dans l'immédiat, le Brexit ne devait donc rien   changer, au nom d'un pragmatisme et d’un réalisme partagés des deux côtés de   la Manche.  Une coopération dans la   construction d’un SNA dont les deux pays possèdent toutes les compétences au   bénéfice de l’Australie pouvait donc être mise en œuvre.
3- Enfin, le comportement américain avec ses alliés confirme bien qu’il ne faut   jamais accorder toute sa confiance aux puissants. Toutes les défaites   militaires des Etats-Unis subies depuis 1945 dans leurs interventions dans   des pays étrangers, qu’elles aient été pour lutter contre les avancées   communistes, mettre la main sur les réserves de pétrole ou au nom d’une   démocratie qu’ils voulaient imposer par la force dans des pays sous influence   de la charia enclins à commettre des attentats en Occident, montrent qu’ils   sont capables du pire, y compris envers leurs amis qu’ils abandonnent sans   états d’âme, quand leurs propres intérêts économiques, financiers ou   stratégiques sont en jeu. Que cela déplaise aux grincheux ou aux   thuriféraires, un président peut s’appeler Trump ou Biden, leurs tropismes   d’égoïsme restent les mêmes dans les objectifs qu’ils veulent atteindre.
  
*Jean   MENU Général de l’Armée de l’air (2 S)
       
       

© 01.10.2021

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